Jusqu’à la Révolution

De Massay à Massais.

Par Yves Duval, historien.

Conférence lundi 20 mars, à 20h30 – Ecuries du Château : Histoire de Massais par Yves Duval, membre de la Shaapt.

HISTOIRE

L’histoire de nos villages n’est autre que l’Histoire de France en petits morceaux.

                                                                                                            Victor Hugo

Première partie :  De MASSAY paroisse de l’Ancien Régime à Massais Commune Républicaine

Introduction

Les archives de Niort ayant brulé en 1805, il est très difficile de trouver des documents sur le Massay ancien. A Poitiers, les archives de l’évêché donnent quelques informations sur la paroisse et les chapelles et à Angers deux documents seulement intéressent directement la commune. Aux archives Thouars ne se trouve qu’un document sur la paroisse avant la Révolution. Aux archives nationales on ne trouve pas de dossier spécifique sur Massay, en revanche la commune est citée dans divers documents qui offrent un intérêt certain.

C’est relativement peu, en revanche les registres paroissiaux, s’ils ne permettent pas de découvrir complètement l’histoire d’une paroisse, sont riches en renseignements sur la démographie, les familles résidentes, les hameaux, fermes et lieux-dits, les métiers, l’évolution de la mode des prénoms et même souvent sur la vie quotidienne et des évènements survenus dans la paroisse.

Malheureusement les archives paroissiales de Massay ne sont conservées que depuis 1722 et ne permettent pas de remonter loin dans le temps. C’est cependant à partir de ces archives qu’a été réalisée cette étude qui devrait permettre à nombre de familles de Massais de se replonger un peu dans la vie de leurs aïeux.

Les recherches ont été complétées à partir d’autres sources en particulier les ouvrages de Gustave Michaud sur le pays Argentonnais et de Maurice Poignat sur le pays Thouarsais, d’une étude sur le conseil municipal pendant la Révolution présentée à un colloque à Poitiers et de divers ouvrages sur le Poitou et l’Anjou.

Les récits de Gustave Michaud sont les plus intéressants. Il a étudié en détail les archives religieuses qui étaient conservées au diocèse de Poitiers. Elles sont désormais aux archives départementales de La Vienne. Il récapitule le nom des curés et vicaires beaucoup plus loin que nous le ferons ici les curés. Ses œuvres ont été publiées.

A partir de l’été 1792, le registre des délibérations du conseil communal, même s’il est succinct par rapport à d’autres villages, donne des précisions intéressantes et seront largement utilisées.

L’étude de la carte de Cassini réalisée vers 1760 et celle du cadastre Napoléonien nous a permis quelques vérifications.

Pour permettre de mieux comprendre comment les archives paroissiales ont été utilisées, le prologue développera l’histoire des registres paroissiaux et leur richesse.

PROLOGUE

De simples enregistrements d’une naissance, d’un mariage ou d’une inhumation, relevés au hasard de la lecture d’un registre paroissial se révèlent souvent riches en enseignements et permettent de faire vagabonder don imagination.

Certains curés notent tous les détails, lieux, âges, professions de tous les acteurs, y compris les témoins.

Chaque enregistrement n’est pas aussi détaillé, mais une profession, un âge, une similitude de noms, le plaisir de découvrir que certaines fermes ou propriétés existaient déjà donnent à la lecture des registres tout leur attrait et sont une source rare pour l’historien.

Certaines notes d’ailleurs sont plus explicites et n’ont besoin d’aucun commentaire. Ainsi un curé relève dans son registre le prix des denrées essentielles lors d’une année difficile et conclut par ce commentaire « cette année le vin a été bien cher ». On imagine que la sobriété n’était pas sa qualité première ! Il est donc souvent possible, non seulement de connaître certaines difficultés connues par les habitants de la commune, mais aussi au fil des années de suivre leur évolution. Malheureusement les curés de Massay ne sont pas très prolixes et leurs relevés sont parfois succincts. Ils sont malgré tout très utiles et certaines pages intercalaires ajoutées sont très révélatrices.

Les registres dont certains remontent au 15° siècle et même exceptionnellement au 14° ne sont donc pas de simples relevés d’état-civil. Ils sont la mémoire du temps de leur époque. Alors que dans les villages à peu près seuls les curés savaient écrire, ils sont parfois les uniques documents qui permettent de retrouver la trace d’une vie de paroisses rurales, devenues communes à la Révolution.

Depuis quelques décennies les études se sont multipliées, mais à notre connaissance Massay n’a jusqu’ici fait l’objet d’aucune recherche particulière en dehors des deux ouvrages cités.

Le présent travail ne vise pas à faire œuvre scientifique, ni à présenter une étude exhaustive des registres de la paroisse, mais simplement à montrer cette richesse et à donner quelques aperçus historiques sur la vie paroissiale, la démographie, les années noires ainsi que sur la période révolutionnaire et ses conséquences immédiates.

Cette étude vise aussi à comprendre pourquoi Massay ne s’est pas ralliée aux Vendéens comme la majorité des paroisses du Bocage et a pu être qualifiée de « butoir de la République » face à la Vendée.

C’est donc aux personnes curieuses de l’histoire de la commune et même de la région que cette étude s’adresse, ainsi qu’à tous ceux qui voudraient, à travers la lecture de leurs registres paroissiaux mieux connaître l’histoire de leur propre commune.

Chapitre 1 : La paroisse et l’histoire des registres

Pour mieux comprendre tout le parti qu’il est possible de tirer des archives paroissiales, mais aussi leurs limites, il nous a paru utile avant de présenter les résultats de notre étude sur Massay de rappeler ce qu’était une paroisse sous l’Ancien Régime, de résumer l’histoire des règles de l’enregistrement des baptêmes, mariages et décès, de présenter la méthodologie suivie et de tirer quelques enseignements généraux sur les coutumes régionales parfois obtenues de recherches effectuées dans d’autres paroisses de la région.

A notre époque la majorité des habitants d’une commune serait dans l’incapacité de dire à quelle paroisse ils appartiennent, d’autant que la diminution des prêtres a contraint au regroupement d’églises de plusieurs bourgs et villages.

Autrefois, il en allait différemment. La paroisse et le diocèse étaient les seules références géographiques et culturelles auxquelles pouvaient se référer les habitants surtout dans les campagnes. Dans les actes officiels ils étaient ainsi désignés « X » de la paroisse Saint Hilaire de Massay du diocèse de Poitiers.

Le mot « paroisse » ne désignait pas seulement une église mais une entité administrative et toute la communauté des habitants qui la fréquentaient et avaient même l’obligation d’y assister à la messe le dimanche et un certain nombre de jours saints presque cinquante dans l’année.

Ces rencontres plus qu’hebdomadaires forgeaient l’esprit de la communauté et avait pour conséquence première que tous se connaissaient.

A la messe, le curé leur rappelait à tous leurs devoirs de chrétiens, mais aussi exposait les actes officiels et parfois donnait des conseils pour mieux vivre au quotidien. A la sortie, chaque fois que nécessaire, la communauté d’habitants se réunissait sur le parvis, dans l’église ou au cimetière pour traiter les affaires communes dont l’élection du chef de fabrique, l’organisme chargé de gérer le temporel de la paroisse, ainsi que de désigner les receveurs de la taille.

Chaque paroisse avait son curé et un ou plusieurs vicaires. Pour ce qui concerne les différentes communes que nous avons étudiées, il n’apparait pas qu’il y eut plus de deux vicaires simultanément. Pourtant le curé pouvait avoir la responsabilité d’une deuxième église appelée « succursale » comme c’était le cas pour Mazières dont l’église de Nuaillé était une succursale. Dans ces circonstances, l’un des vicaires était souvent désigné comme prêtre desservant, mais les évènements principaux, en particulier la communion pascale et les mariages se déroulaient normalement dans l’église principale et tous les actes y étaient enregistrés.

Les curés devaient disposer d’un presbytère, mis à disposition par la fabrique, et vivre dans la paroisse, mais la lecture des registres montre qu’il n’en était pas toujours ainsi. De nombreux actes sont signés d’un prêtre desservant ou d’un vicaire, preuve que le curé ne vivait pas toujours près de ses ouailles. Ce n’est pas le cas à Massay où c’est le plus souvent le curé qui signe. Mais la cure était source de revenus ; la dîme était perçue sur tous les habitants y compris les nobles au profit du curé lorsqu’elle ne revenait pas de droit à une autorité religieuse supérieure. Dans ce dernier cas les ressources du curé étaient alors limitées à « la portion congrue » somme que le bénéficiaire de la dîme, le décimateur, devait lui verser. Les vicaires étaient alors logés à la même enseigne, une portion congrue plus réduite. Ainsi au début du XIII° siècle, la portion congrue des curés était de 300 livres et celle des vicaires de 150 livres. Juste avant la Révolution, la portion congrue des curés était passée à 800 livres preuve que l’inflation existait déjà !

A Massay, le curé ne disposait pas de la dîme sur toutes les terres. Certaines congrégations étaient décimateurs. Quant aux charges, leur partage était assez complexe. Par exemple la fabrique était responsable de l’entretien de la nef, du clocher et du presbytère, le curé du chœur et de l’autel.

Les quêtes à la messe existaient, mais rapportaient sans doute fort peu à Massay où les habitants n’étaient pas riches. En revanche les messes pour les morts, souvent demandées en grand nombre et les cérémonies officielles comme les mariages et les inhumations étaient une ressource supplémentaire non négligeable. Il arrivait qu’un paroissien demande 100 messes pour un défunt de sa famille. La réglementation relative au coût de ces cérémonies, appelée « le casuel » fixait la somme prescrite pour chaque type de prestations. Le registre de Mazières est intéressant à cet égard puisque ses premières pages indiquent pour la succursale de Nuaillé ce que devront les paroissiens pour tous les actes effectués dans leur église. Chaque acte est codifié et coûte en général 20 sols. (à peu près la valeur de trois journées de travail d’un journalier au 18° siècle). A Massay les curés n’ont pas spécifié le casuel, mais l’un d’eux enregistre une fois un reçu de 8 sols pour l’enterrement d’une personne. S’agit-il de la somme totale prévue par le casuel ou de la seule part versée par l’un des héritiers ? il est impossible de le savoir.

Très souvent le curé, comme la fabrique disposait aussi de terres ; ils avaient bénéficié de legs.

L’historique des registres

C’est par une ordonnance royale de Villers-Cotterets de 1539 qu’est prescrit pour la première fois aux curés de toute la France de rédiger un « registre en forme de preuves de baptêmes », mais dans certains évêchés dont ceux de Nantes et de Poitiers cette consigne avait été donnée plus tôt et le plus vieux registre connu en France est celui de Givry en Bourgogne qui remonte à 1303. Il m’est arrivé de faire des recherches dans des registres écrits en latin… L’ordonnance de Villers-Cotterets ne semble pas avoir été parfaitement suivie dans la région Thouarsais, car nulle trace n’en existe dans les registres consultés, à moins que la totalité des registres ait été perdue.

L’ordonnance de Blois en 1579 demande d’étendre l’enregistrement aux mariages et sépultures. Elle semble n’avoir pas eu une totale application même si elle a été mieux suivie. Plusieurs raisons peuvent expliquer cet insuccès relatif. D’une part rien ne prouve que cette ordonnance ait reçu la diffusion nécessaire et que tous les curés en aient été informés. On verra plus tard que dans « les Marches Communes » auxquelles appartenait Massay, les ordonnances ou édits étaient mal diffusés. D’autre part, si tous les curés savaient écrire, certains ont sans doute hésité sur la forme à donner à cet enregistrement et n’ont pas compris l’intérêt pratique et historique que leur conservation pouvait représenter d’autant qu’aucune consigne n’était donnée pour cette conservation. Enfin la rareté du papier et son coût ont peut-être joué un rôle dissuasif. On constate d’ailleurs dans les registres les plus anciens, comme à La Chapelle-du-Genêt, que les curés utilisent l’écriture la plus serrée possible afin d’économiser le précieux papier. C’est aussi le cas à Massay pour les premières pages.

En 1614, c’est le pape Paul V qui publie un rituel ordonnant la tenue des baptêmes, confirmations, mariages et sépultures. Cet ordre a encore moins d’effet que les précédents. Aucun enregistrement de confirmations n’a été relevé. En revanche nous avons trouvé dans une paroisse la liste de toutes les personnes qui avaient fait leur communion pascale. Le curé devait être très strict !

Cependant l’habitude de rédiger les cahiers s’est étendue peu à peu. Les premiers ne concernent souvent que les baptêmes, mais sépultures et mariages apparaissent aussi fréquemment avant 1667, date à laquelle l’enregistrement des actes paroissiaux est plus sérieusement codifié.

C’est le « code Louis » qui indique, entre autres considérations, que les registres doivent être fournis par la fabrique. Ils doivent être rédigés en deux exemplaires, l’un conservé à la paroisse, l’autre porté au tribunal royal pour y être conservé. L’exécution de ce deuxième exemplaire n’est pas toujours exécutée dans de bonnes conditions et ne contient ni les réflexions éventuelles notées par le curé dans l’exemplaire conservé ni d’éventuelles feuilles jointes ou directives recopiées. Ces deuxièmes registres, comme les premiers sont désormais conservés aux archives départementales. Il m’est pourtant arrivé en fouillant un placard dans une mairie de trouver tous les registres paroissiaux datant de la fin du XVI° siècle jusqu’à la Révolution.

A partir de cette date les âges et les professions apparaissent plus systématiquement, et une autre ordonnance en 1737 apportera quelques précisions sur l’archivage de ces registres.

Enfin c’est un décret de la Convention qui, le 21 septembre 1792, après la proclamation de la République crée les registres d’état-civil et les confie à l’autorité municipale. Là non plus, surtout dans nos régions, l’exécution n’est pas toujours immédiate et le réflexe de déclarer la naissance à la mairie ne l’est pas non plus. Les registres des curés continueront encore quelques mois à en faire office, et même quelques années en pays Vendéen. Ils seront alors particulièrement intéressants pour tous ceux qui se passionnent pour la période révolutionnaire.

Compte tenu des disparitions ou destructions, des disparités importantes existent dans la qualité des archives départementales. Elles sont souvent incomplètes, c’est le cas de Massay, et parfois très abimées. Pour les plus anciennes certains dossiers sont illisibles. L’encre s’est par trop effacée ou les dossiers ont été tachés ou ont moisi. D’autres ont été remarquablement conservés. On se demande parfois par quel miracle en lisant les évènements survenus dans la paroisse pendant la Révolution.

Quelle que soit la qualité des archives de registres paroissiaux, ils sont la preuve incontestable du rôle des curés, non seulement directeurs de conscience mais aussi conseillers en de multiples domaines et porte-paroles de l’autorité avec des obligations certaines comme celle de lire tous les trois mois l’ordonnance d’Henri II qui condamnait à mort les jeunes filles ou les veuves qui auraient accouché d’un enfant mort-né sans avoir fait auparavant une déclaration de grossesse !

 Chaque année le registre est ouvert à Massay par le sénéchal de Saumur qui donne ses consignes.

Chapitre 2 : Curés et Officiers publics de Massay (Massais)

Il nous a semblé intéressant de présenter les rédacteurs des registres paroissiaux puis d’état-civil de la commune. Ces curés, puis les officiers publics, le plus souvent le maire, sont en effet des personnalités de la commune, y ont joué un rôle majeur et certains ont eu un parcours ou un destin peu banal.

Les curés

Le premier d’entre eux dont nous avons la trace dans les registres est Pierre Meslé en 1722. Ce n’est certainement pas le premier à avoir rédigé des registres de Massay, mais la perte des archives ne permet pas de remonter plus haut.

En 1722 Pierre Meslé a déjà 65 ans. Il est originaire de la paroisse. Mais les Meslé sont nombreux à Massay et y sont déjà présents au XVI° siècle.

Ce curé écrit assez mal et n’est pas toujours compréhensible. Son orthographe est très fantaisiste mais ses erreurs concernent surtout les noms propres qui, c’est bien connu, « n’ont pas d’orthographe. » Cela est d’autant plus vrai à l’époque que la quasi-totalité des gens de Massay ne savent pas écrire ni même vraiment signer de leur nom. Ils ne peuvent donc l’épeler au curé qui suit alors sa fantaisie. Ainsi les noms se terminant par les sons « O » sont écrits indifféremment « EAU », « AULT », « AUD » ou « AULD ». Il en est ainsi de la famille Pineau dont le même représentant peut s’écrire d’une façon ou d’une autre dans des actes différents et même parfois dans le même acte ! Malgré cette orthographe fantaisiste, il est possible d’identifier plusieurs familles encore bien connues à Massais, Martineau, Girard, Billy, Turpault, Pineau, Clochard etc…

Les noms de lieu sont aussi écrits de façon fantaisiste, mais dans ce domaine c’est plutôt à une évolution au fil du temps à laquelle on assistera. Pierre Meslé écrit « Les de fois » par la suite on trouvera « Aux defois » puis « Aux deux fois » et également « Hautdefois » avant d’arriver définitivement à « Audefois ». Quant aux « La Brousse » elles étaient écrites autrefois « La Brosse » ainsi La Brosse Galète a précédé La Brousse Gallet.

Bien des fermes ou des hameaux verront ainsi leur nom évoluer. Les Brulletières deviendront Les Brunetières ; La Ginchère deviendra Les Inchères ou l’Inchère  et le moulin Mercerot deviendra le moulin Mercelot.

En 1722, il ne reste plus très longtemps à vivre au curé Pierre Meslé. Son décès est enregistré le 18 octobre 1727, il a 70 ans et 6 mois et il est enterré « dans l’église au pied de la table de communion ». Cet honneur prouve que le curé était très considéré. C’est l’un des deux seuls enterrements dans l’église que nous ayons relevés à Massay. L’autre étant Messire De Rangot, écuyer, seigneur de La Roussière.

Dans la liste des assistants à l’inhumation du curé on est surpris de lire le nom du père du défunt qui porte aussi le prénom de Pierre. Il est tentant de penser à une erreur, pourtant c’est la réalité. A la date du 22 décembre de la même année, ce père décède et dans l’acte d’inhumation il est précisé qu’il est mort à 98 ans et trois mois ! C’est une longévité exceptionnelle pour l’époque. C’est aussi une précision assez exceptionnelle, car peu de gens savaient exactement leur âge. Il arrive de trouver des vieillards à qui le curé attribue 90 ans environ et qui en réalité n’en ont que 85. Dans le cas présent il est très probable que le curé officiant a vérifié la date de naissance dans les registres, ce qui confirme l’hypothèse qu’à l’époque les registres antérieurs à 1722 étaient encore archivés à Massay.

Peu de temps avant sa mort, le curé Meslé avait été suppléé dans ses fonctions par divers curés de la région et en particulier par Delaunay qui signe quelques actes « curé de Massay et de Passavant ». C’est donc le curé de Passavant qui hérite de la cure de la paroisse tout en conservant quelques semaines son ancienne fonction. De fait il avait été curé de Passvant depuis 1708 comme l’indique le registre de cette paroisse.

Les actes rédigés par Delaunay sont écrits plus lisiblement, mais malheureusement avec peu de précisions d’âge, de lieux ou de professions. Ils sont donc d’un moindre intérêt.

Le 27 février 1734, Delainay signe son dernier acte de curé de Massay. Il n’y a pas de trace de son enterrement, il a donc sans doute été affecté ailleurs.

Il est remplacé par le curé Oudry qui signe son premier acte le 16 mars 1734. Son écriture est lisible et il a l’intelligence d’indiquer en marge le sacrement donné et le nom de la personne concernée, ce qui facilite grandement l’analyse du registre. Malheureusement il ne donne qu’exceptionnellement les noms de lieux et les métiers et surtout il n’enregistre pas les décès d’enfants, sauf de rares exceptions, ce qui est dommage mais a aussi été constaté dans d’autres paroisses sans que nous en comprenions la raison.

Il dispose au moins en 1735 d’un vicaire du nom de Pelourde dont la signature apparait quelques mois cette année-là puis très épisodiquement jusqu’en 1747 et dont le décès est enregistré en 1750.

Notons que, dans les registres, apparaissent à cette époque diverses pages qui n’ont rien à voir avec les actes religieux exécutés par les curés successifs mais qui présentent un intérêt certain et sont révélateurs de quelques maux qui pouvaient toucher la région. On trouve ainsi une longue recette de remède à partir d’asarum ou « oreille d’homme » pour guérir « les maux de tête qui sont opiniâtres et rebelles et qui viennent d’une manière visqueuse et tenace, et contre les douleurs gravatives, paralysies et maladies soporeuses ». Ce remède a sans doute été lu à la messe, car nombre de curés avaient l’habitude de donner des conseils de tout ordre à leurs ouailles.

Un autre remède concerne une mixture contre les morsures d’animaux enragés. D’autres intéressent les fièvres quartes, et les animaux ne sont pas oubliés puisqu’il y a aussi un remède contre les maladies des bêtes à cornes.

On trouve aussi dans les registres des feuilles intercalées qui indiquent les condamnations des faux-sauniers. La condamnation à cette date pour un trafic important de sel ou une récidive est de six ans de galère et d’avoir l’épaule marquée au fer rouge des lettres GAL. Pour un lieutenant de gabelle c’est une condamnation à vie qui est prononcée. D’autres intercalaires sont des extraits de listings de « minots » (la mesure du sel à l’époque) à divers organismes de la région dont les religieuses de Saumur. Il n’est pas indiqué la provenance de ce sel, sans doute récupéré par les gabelous de Massais sur des faux-sauniers.

On peut aussi trouver dans le registre paroissial une petite comptine mi en Français mi en Latin.

Le curé d’Argenton partoit,

Le curé de Boesse sautoit,

Hostem repellas longius

Pacemque donas protinus

  Ce qui peut se traduire « Tu repousses l’ennemi au loin et tu donnes la paix plus longtemps » Quelle est la signification profonde de ce quatrain, on ne le saura jamais mais les relations entre curés voisins ne devaient pas être au beau fixe. Et compte tenu de cet écrit il est probable que le registre consulté est l’original de la paroisse et non la copie envoyée au sénéchal de Saumur…

Il est probable que René Marc Louis Babaud vint prendre la place de vicaire à la place de Pelourde et commence à cette date son aventure à Massay bien que rien ne le signale dans les registres. Mais l’histoire des Babaud, puisqu’ils furent deux à se relayer à la cure, mérite d’être contée.

René est né à Mont-sur-Guesne dans la Vienne en 1723. Il est le fils de Messire Pierre Babaud licencié ès loi, et a deux frères, Pierre Marc et Jean Daniel qui sera avocat au parlement et épousera la fille du procureur du présidial de Poitiers. Les Babaud sont donc des gens importants ; la qualité de leur écriture est d’ailleurs la preuve de leur éducation.

Il est impossible de savoir ce qui a conduit René à Massay, mais si on retrouve plus tard la trace de son frère Pierre à Mont-sur-Guesne, son autre frère Jean a aussi quitté cette commune et nous retrouverons ses enfants à Massay. Peut-être est-il décédé assez jeune et ses enfants ont été confiés à leur oncle.

Donc René Babaud est d’abord vicaire à Massay et à partir de novembre 1759 c’est lui qui signe tous les actes. Le curé Oudry est sans doute déjà malade, mais on ne trouve sa trace que pour son enterrement en 1763. Il était donc resté dans la paroisse. Cependant depuis Août 1762, Babaud signe « curé de Massay ». La charge lui a donc été attribuée officiellement.

Il la remplira jusqu’en Mars 1780, date à laquelle deux lignes du registre indiquent « le 10 Mars le sieur Marc Babaud a remplacé Messire René Marc Louis Babaud son oncle ». Heureusement que le registre apporte cette précision, car l’écriture et la signature du neveu sont quasi identiques à celles de l’oncle et les confusions auraient été possibles. C’est certainement l’oncle qui a assuré l’éducation de son neveu comme celle de son autre neveu Jean Louis dont nous reparlerons.

Quand il résigne sa cure, René n’est pas encore très vieux ; il va d’ailleurs refaire son apparition en 1790 pendant la Révolution. Marc, le neveu, qui assure le ministère depuis 1780 refuse en effet de prêter le serment à la constitution exigé de tout le clergé. Il est donc contraint de s’exiler ou de se cacher. Selon Gustave Michaud il aurait été jeté dans le Thouet. Maurice Poignat décrit même cette mort comme une certitude. Mais aucune référence ne permet de confirmer les faits et il peut paraître étonnant que les deux neveux soient restés à Massay s’ils sont avérés.

René Babaud cependant qui a accepté de prêter le serment reprend donc du service et remplace le neveu à qui il avait cédé sa place une décennie plus tôt. Il décèdera l’An IX et son acte de décès le déclare « prêtre pensionnaire ecclésiastique de la République »

Marc le neveu et curé avait aussi été désigné comme officier public, mais il avait refusé la charge alors que Jean-Louis un autre neveu frère de Marc l’a ensuite accepté et est l’un des premiers à apposer sa griffe en tant que tel mais encore dans le registre paroissial. Il a dû un temps y avoir de l’ambiance dans la famille !

Aucune rue de Massais ne porte le nom d’une personnalité locale, s’il devait y en avoir une, elle pourrait porter le nom de « rue Babaud » sans indication de prénom. Ainsi de quelque côté politique que penchent les habitants, ils pourraient être satisfaits.

Jean-Louis pour sa part était le boulanger du village et avait organisé la garde nationale très rapidement, ce qui prouve son influence dans la commune. Il conduisit d’ailleurs cette garde à Argenton pour s’opposer à l’approche des Vendéens comme nous le verrons plus tard.

Les officiers d’état-civil

Les registres d’état-civil ne débutent qu’en janvier 1793. Le premier signataire en tant que « membre du conseil général de la commune de Massais » est un certain Léger Bazile qui était chirurgien. Il n’est pas natif de Massais et sa famille n’y était pas implantée auparavant.

Nous ne citerons pas tous les signataires du registre pendant la période révolutionnaire, ils changent très fréquemment. Mais l’un d’eux mérite une mention particulière. C’est Louis Jaudonnet qui a été président de la fabrique avant la Révolution donc un membre influent de la paroisse très proche du curé. Il faut cependant préciser que lorsqu’il accepte le poste d’officier public, la Terreur est terminée et que nous sommes sous le régime du Directoire.

 Il est amusant de constater que là où il fallait quatre ou cinq lignes aux curés pour enregistrer un baptême, il en faut 28 à Léger Bazile pour l’enregistrement d’un acte de naissance sans qu’aucun renseignement complémentaire intéressant soit apporté. Serait-ce le début du règne de l’administration ?

Notons aussi qu’en pleine période de la Terreur les habitudes sont parfois trop fortes et que le rédacteur écrit encore « Bouillé-Saint-Paul » alors que le nom a été changé et qu’il devrait écrire Bouillé-l’Ormeau. Personne n’a jugé utile de corriger.

A partir de 1803 Jean Louis Babaud signe en tant que maire. Il gardera la fonction jusqu’en septembre 1815, c’est-à-dire après la Restauration et les Cent Jours. Il est alors remplacé par Benjamin Marillet, dont le frère avait été fusillé à Niort en 1794. Il habitait La Davière. La propriété n’a pas été confisquée ce qui laisse penser que Benjamin a continué à l’occuper avec sa mère pendant la Révolution.

Benjamin Marillet est né en 1782, il a donc 33 ans quand il est désigné comme maire et il signe fièrement « Marillet De La Davière ». Il restera maire pendant neuf ans et pendant son mandat aura à enregistrer d’étonnantes naissances dont nous reparlerons.

Parmi les successeurs signalons Louis Turpault nouveau propriétaire à La Rétière. Sa qualité première n’est certainement pas l’orthographe, ni la géographie. Dans un des actes il écrit que l’intéressé est né dans le département de « Mèlenoire » ( Maine et Loire ?). Quant aux personnes décédées, elles ont droit au qualificatif de « feut » !

Chapitre 3 : MASSAY, VILLAGE FRONTIERE

Géographiquement et historiquement Massay est un village frontière. Massay se trouve ainsi à la frontière entre pays de plaine et de bocage comme l’indiquait la pancarte à l’orée du village qui précisait, jusqu’au 31 décembre 2013, que l’on entrait en « Pays Argentonnais .». Le rattachement depuis de la commune à la communauté du Thouarsais a conduit à enlever cette pancarte sans pourtant changer la nature du sol ! Historiquement surtout Massay est un village frontière car il appartenait aux Marches Communes de l’Anjou et du Poitou.                                                          

« Marches » à l’époque signifiait « limite ou frontière » Cette situation entre deux provinces avait des conséquences importantes surtout au plan du droit. Cela explique que seuls des juristes se soient intéressés à ce petit pays.

Administration et juridiction

            Ces Marches Communes entre l’Anjou et le Poitou concernaient une trentaine de paroisses en deux secteurs l’un situé entre Brion et Massay[1], l’autre au sud de Cholet autour de Mortagne.  Un troisième secteur de Marches séparait le Poitou et la Bretagne.

            L’encyclopédie du XVIII° siècle précise ce qu’étaient ces marches communes : « C’est le nom d’un petit pays dont les géographes ne disent rien, mais qui, par sa constitution particulière, mérite une place assez considérable dans le dictionnaire de jurisprudence. Il est situé entre le Poitou, la Bretagne et l’Anjou. Toutes les paroisses qui le composent sont communes non pas entre trois provinces mais entre deux seulement : le Poitou et la Bretagne , le Poitou et l’Anjou. Et La Bretagne et l’Anjou »

            Massay appartenait au secteur le plus à l’Est entre Thouars et Montreuil-Bellay qui comprenait 16 paroisses. L’origine de ces Marches fait l’objet d’hypothèses les plus variées, les documents les plus anciens qui les évoquent datant du XII° siècle et situant donc leur création au mieux quelques décennies auparavant. Pour notre part, nous pensons que cette existence découle d’une situation très ancienne confirmée par les écrits de César.

Il existait en effet trois petites tribus Gauloises situées entre les grands peuples des Pictons au Sud, les Andicaves dans le secteur Angevin et les Namnètes en région Bretagne.

            Un modus vivendi se serait ainsi instauré sous la tutelle Romaine. Devenu une véritable coutume la situation de fait aurait été entérinée à la création des Provinces sous l’autorité des Francs et les paroisses des Marches sont considérées comme appartenant à deux Provinces avec des règles bien spécifiques et parfois compliquées en particulier dans le domaine judiciaire. Les secteurs occupés par les trois petites tribus pourraient correspondre aux trois secteurs qui constituent les Marches Communes.

            Ce qui conforte cette hypothèse c’est que plusieurs arrêts royaux confirmant les droits des Marchetons (les habitants des Marches Communes) commencent par cette affirmation « Attendu que les Marches n’ont jamais appartenu à l’une ou l’autre des Provinces … »      

            Ainsi les paroisses de Marches sont considérées comme liées aux deux provinces mais soumises à des règles spécifiques. Cela fait du secteur non pas un pays neutre, mais neutralisé. Ce statut a entraîné quelques complications au niveau des procédures judiciaires, mais a conféré plusieurs privilèges aux habitants.

            Dans les Marches Communes, les seigneurs voisins ne pouvaient être propriétaires en propre dans les Marches. Au mieux une terre noble devait être possédée en indivis par un noble poitevin et un autre angevin. De fait aucun grand domaine n’est établi dans les Marches et aucun château fortifié n’y est construit à l’exception de celui de Bouillé-Saint-Paul qui bénéficiera assez tard d’une autorisation particulière du Roi.

            Pour les contentieux, plusieurs difficultés se présentent. Il faut d’abord savoir si la question relève de la justice royale ou de la justice seigneuriale. Même si au 18° siècle la justice royale s’est étendue à presque tous les domaines et la justice seigneuriale est plus rarement responsable. Pour cette dernière les Massaisiens sont soumis soit au seigneur de Thouars, soit à celui de Montreuil-Bellay. Un accord entre les deux seigneurs décide celui qui jugera.

            Pour la justice royale il faut trancher sur le tribunal qui est en charge du jugement : Saumur avec appel au parlement d’Angers ou Poitiers avec possibilité d’appel au parlement de Paris. L’appartenance aux marches communes confère en effet   aux habitants un certain nombre de privilèges comme celui de choisir ou d’être soumis à la juridiction saisie en premier en cas de conflit – c’est ce qu’on appelait le principe de prévention – et de bénéficier, selon le cas d’un jugement plus favorable En théorie, c’est le tribunal qui est saisi en premier qui sera le siège du jugement. Mais chaque cour essaie de se saisir du dossier et conteste souvent la saisine de l’autre. Ce qui complique et ralentit l’application de la justice, d’autant que dans tous les cas l’autre province doit être tenue informée.

            Enfin troisième difficulté, en théorie les jugements devaient se faire moitié selon la coutume d’Anjou et moitié selon celle du Poitou, on peut penser que chaque cour avait tendance malgré tout à favoriser la coutume de sa province et de toute manière dans nombre de cas la coutume n’était pas partageable. Lorsqu’il s’agit d’un conflit d’argent, il est possible d’établir une moyenne, mais dans bien d’autres cas, y compris pour les sanctions de crimes et délits, comment juger équitablement en appliquant des coutumes bien différentes ?

            Dans cette situation, les conflits entre les parlements d’Angers et de Poitiers ne pouvaient manquer d’éclater. D’ailleurs les deux seuls écrivains ayant développé le sujet à l’époque des Marches émettent des opinions divergentes. Ils sont pourtant tous deux juristes, mais Pocquet de Livonnière est Angevin et Hullin est Poitevin.  Or ces coutumes sont effectivement assez différentes selon chaque province. A titre d’exemple dans une province une épouse ne peut hériter de son mari décédé que si elle est mariée depuis au moins un an. Dans l’autre elle peut hériter dès que le mariage a été enregistré. Autre exemple le recouvrement des dettes est prescrit au bout de 7 ans dans une province et après dix ans dans l’autre. Ainsi tester à Angers ou à Poitiers peut avoir des conséquences importantes.

            Cependant des réglementations successives ont donné peu à peu la priorité à l’Anjou. Louis XIII en 1633 a décidé que tous les jugements pour les paroisses du secteur se feraient à la Sénéchaussée de Saumur et les appels à Angers. Cette décision a soulevé une grande polémique et en particulier la réaction du Duc de La Trimouille (sic) qui était responsable de la basse justice dans son secteur et celle du Duc de Longueville seigneur de la baronnie de Montreuil-Bellay. Entre 1633 et 1636 plusieurs arrêts du Roi ont été publiés. Ils font référence aux réclamations de « mon cher cousin le Duc de La Trimouille » (sic) et à un accord qui aurait été signé entre les deux seigneurs mais contre lequel s’élève le procureur du Roi. Le Parlement de Poitiers a aussi réagi, et finalement malgré une rédaction très confuse il apparaît que 4 villages sont rattachés à Thouars et au Poitou, les autres à l’Anjou. Massay à partir de cette date est clairement rattaché à la Sénéchaussée de Saumur et au parlement d’Angers mais les juges dans certains cas doivent toujours interpréter par moitié selon les coutumes des deux provinces ! 

            Les différents arrêts du Roi sont longs et confus mais ils doivent être lus à à la messe dominicale par les curés ; il est douteux qu’un seul paroissien ait pu comprendre un mot de ces textes.         

            Ces difficultés juridiques ne doivent intéresser qu’une minorité d’habitants mais l’appartenance aux Marches leur confère quelques avantages :

            Ils n’ont pas à payer la gabelle au même titre que les Poitevins. Ils n’ont pas à « tirer à la milice » pour alimenter les régiments provinciaux. Appartenant à 2 provinces, pour laquelle auraient-ils dû tirer ? Ils ne subissent pas les contraintes d’un pouvoir seigneurial souvent très pesant. Pas de fours ou de moulins banaux obligatoires, ce qui explique d’ailleurs l’existence à Massais de 6 moulins à eau et 9 à vent.

            En revanche cette absence seigneuriale a quelques inconvénients. La terre est morcelée et au fil des siècles appartient le plus souvent à des bourgeois des villes âpres au gain et peu soucieux de protéger les habitants. Alors qu’ailleurs ce sont souvent les nobles qui créaient les écoles, faisaient la charité et étaient moteurs du progrès, rien de tel à Massais et dans les Marches Communes. Le secteur se développe peu, ce qui vaudra aux habitants de la paroisse le surnom peu reluisant de « Gueux de Massais. »

            La Révolution mettra fin aux Marches Communes et rattachera la majorité des paroisses du secteur à un département fort mal conçu les Deux-Sèvres

Gabelous et Faux-sauniers

            L’appartenance de Massay à une zone spécifique entre le Poitou et l’Anjou particulièrement propice pour le trafic du sel renforce le qualificatif de « village frontière » qui lui est attribué.

            Située dans une zone tampon entre une Province non taxée, dite « redimée » le Poitou et une région de grande gabelle, la paroisse qui se trouve par ailleurs sur le chemin de La Rochelle à Saumur est dans un secteur clé pour le passage des faux-sauniers.

            Quant aux habitants de Massay, ils sont dans ce domaine considérés comme Poitevins et ne paient pas la gabelle. Dans le domaine fiscal comme dans quelques autres, c’est la règle la plus avantageuse ente les deux provinces qui s’applique. Ce qui n’empêche pas les Massaisiens d’être soumis à la Taille et à toutes les autres contributions qu’elles soient dues à un seigneur, au curé ou au Roi.

            Nous n’avons pas trouvé trace de condamnation d’habitant de Massais pour trafic de sel, pourtant cela devait être tentant.

            Le « minot » mesure de sel, équivalent à un peu moins de 50 kilos selon Robert Ducluzeau auteur d’un ouvrage sur la gabelle dans l’Ouest, revenait à une livre 10 sols dans les marais de Brouage, était revendu 8 livres dans les Marches Communes et 64 livres à Cholet ou Saumur.

La réglementation concernant l’achat de sel était d’ailleurs extrêmement complexe. Dans les régions de grande gabelle comme l’Anjou, les habitants étaient obligés d’acheter chaque année une certaine quantité de sel au grenier à sel du secteur, même s’ils n’en avaient pas le besoin. Ils pouvaient en acheter plus bien sûr puisque cela rapportait beaucoup à l’Etat et aux fermiers généraux mais à un prix prohibitif comparé à celui offert par la contrebande.

Dans les pays de franche gabelle la vente était libre, mais il avait été décrété que dans un rayon de 5 lieues aux abords des frontières avec la Province voisine, donc à Massay, la vente ne serait plus libre. Les habitants devaient alors se fournir uniquement dans des « dépôts de sel » et la quantité qui leur était allouée était strictement limitée. Ainsi les habitants de Massay devaient se fournir à Argenton-Château et avaient une dotation d’un minot pour 7 personnes.

Thouars également proche de la frontière était dans la même situation et un dépôt de sel improprement appelé « grenier » était installé.

Cette mesure avait pour but de limiter la contrebande. Elle n’avait pas un grand effet. Necker dans son rapport sur les finances indique que, aux frontières du Poitou, en année normale les gabelous arrêtaient 2300 hommes, 1800 femmes et 6 600 enfants ! Si l’on considère que probablement seule une personne sur dix était arrêtée, ce qui serait déjà bien, Plus de 100 000 transactions illégales seraient ainsi réalisées chaque année. On comprend que la lutte ait été féroce entre gabelous et faux-sauniers professionnels ou occasionnels. L’Etat voulait sévir très sévèrement.

L’amende, même pour le passage d’une livre de sel ne pouvait être inférieure à 100 livres (la peine plancher avait déjà été inventée). Cela correspondait presque à la moitié d’un salaire annuel d’un journalier. Beaucoup ne pouvaient pas payer ; alors la peine était commuée en châtiment au fouet sur la place publique ou en trois ans de galère. Pour les faux-sauniers utilisant un cheval ou un âne, la peine était au moins de trois ans de galère.

Il n’est pas étonnant de constater qu’à Massay était implanté un poste de « gabelous », d’autant que le pont de Massay était en particulier un passage à surveiller. Nous n’avons pu identifier leur logement, mais il est probable que leur poste était situé non loin du pont, peut-être au Logis très proche et possédant une belle vue sur l’Argenton.

Il y a à Massay en permanence au XVIII° siècle au moins un lieutenant et au moins cinq employés de gabelle. Il ne semble pas qu’ils soient recrutés sur place, car leurs noms de famille : Chauvigny, Gambault ? Gaultier, Fermier, Denoue, Cornil, Marchand etc… n’apparaissent pas habituellement dans la paroisse. Cependant ils vivent en famille comme le prouvent les actes de baptême enregistrés et y sont enterrés s’ils décèdent. Il est certain cependant qu’ils ne sont pas bien intégrés. Leurs noms n’apparaissent presque jamais comme témoins dans les actes paroissiaux concernant les familles locales. Personne sans doute n’aimait les gabelous.

Nouveau statut

Si la Révolution met fin à la gabelle, elle bouleverse aussi les habitudes, les liens de la commune et avant tout son nom.

Le dernier registre paroissial archivé, celui de 1792 ouvert par le sénéchal de Saumur, est toujours avec l’orthographe de Massay. Le premier registre d’état-civil le 14 décembre 1792 est ouvert par Simon Marillet au titre « d’Administrateur du Directoire du District de Thouars » Il utilise l’orthographe Massais.

Ce changement d’écriture de Massay en Massais reste un peu mystérieux. Nous n’avons trouvé aucun acte qui l’officialise. Le premier document connu émane de Thouars et la nouvelle orthographe est ensuite toujours utilisée lors du changement des noms des communes du secteur, toutes celles qui utilisaient le mot « Saint » ou celui de « Château » ayant dû les abandonner. Il est possible qu’un document officiel ait été établie listant les noms du canton ou du département. Si dans cette liste Massay était écrit Massais, même par erreur, il est logique que l’orthographe ait été adoptée. Mais ceci n’est qu’une hypothèse.

Ce n’est pas le seul changement important. On sait que la définition des limites des départements a fait l’objet d’âpres luttes entre les représentants du peuple. La structure du département des Deux-Sèvres est le résultat de ces difficultés, et le choix, même annoncé comme provisoire, de Niort décentré et concurrencé par Saint-Maixent, Parthenay et Thouars est la preuve du pouvoir de certains élus.

Thibaudeau, un élu de Poitiers, raconte dans le détail les transactions pour la création des départements. L’Anjou a cédé sans difficultés les Marches communes qui nous intéressent, preuve qu’Angers n’y était guère attaché. Seuls les représentants de Saumur plus directement concernés se sont battus contre la création des Deux-Sèvres. Ils espéraient la création d’un département dont Saumur serait le chef-lieu englobant le Loudunois et les Marches Communes. Mais que pouvaient faire les quatre élus de Saumur contre près de 50 élus de Poitiers et d’Angers ?

Pour les habitants de Massais, c’est une révolution ; ils ne sont plus du tout liés à l’Anjou et à Saumur, mais définitivement habitants des Deux-Sèvres (le numéro 75 dans le listing de l’époque), résidents du Poitou et leur sous-préfecture est Thouars. C’est du moins ce qu’ils peuvent croire et les satisfait. Cette situation ne va pas durer longtemps. Thouars va rapidement être remplacé par Bressuire, non pas parce que la ville est plus importante mais au contraire pour relever Bressuire de ses ruines.

Les registres le confirment. Ceux de l’ An XIII (1805) font toujours référence à Thouars ; ceux de l’An XIV sont ouverts à Bressuire. C’est Napoléon qui, lors d’une visite dans la région et dans le pays Vendéen décida de transférer le chef-lieu d’arrondissement pour faire revivre Bressuire mais aussi donner une satisfaction au pays vendéen.

Massais est aussi rattaché par la Révolution au diocèse de Saint-Maixent, choisi par la Législative pour siège de l’évêché du département. Ce sera un évêché bien éphémère puisqu’ avec le refus d’un premier élu et la démission d’un deuxième, le titulaire suivant ne restera pas longtemps. C’est Jean-Joseph Mestadier, ancien curé de Breuilles. Les rares écrits sur ce personnage le décrivent comme l’un des pires évêques constitutionnels. C’est un arriviste de peu d’envergure qui a été élu pour ses propos révolutionnaires. Il gardera cette attitude prônant la mort des nobles et des prêtres insermentés ainsi que le mariage des prêtres. Il donnera d’ailleurs l’exemple accompagnant les troupes révolutionnaires mais démissionnera, se mariera et finira maître d’école sans avoir jamais été remplacé. Depuis c’est à nouveau à Poitiers que Massais est rattaché au plan religieux.

Chapitre 4 : L’EVOLUTION DEMOGRAPHIQUE

La mesure de l’évolution démographique

Il n’existait pas de recensement sous l’Ancien Régime, il nous semble donc nécessaire d’expliquer la méthode que nous avons utilisée pour notre étude.

Dans bien des secteurs, cette évolution est calculée à partir des registres de la taille. Mais cette méthode est peu fiable et les documents manquent pour Massay. Heureusement la démographie peut être calculée plus précisément grâce aux registres paroissiaux.

Il importe cependant de prendre en compte certaines particularités locales qui relativisent quelques résultats avant d’exposer la méthode d’analyse de la population à partir des naissances.

D’une part souvent les enfants morts-nés ne sont pas pris en compte. Parfois le curé inscrit dans le registre un baptême exécuté le jour de la naissance par la matrone ou un proche parent en précisant que le bébé était en grand danger de mort. Il est probable que dans un certain nombre de cas il s’agisse d’enfants morts-nés que les parents n’ont pas voulu être déclarés comme tels et ont voulu baptiser malgré tout, en effet un bébé mort non baptisé n’était pas admis au paradis mais condamné à errer dans les limbes.

Il était même parfois pratiqué des baptêmes intra-utérins dont la validité peut sembler douteuse. Le pourcentage de naissances non déclarées ne peut être connu, mais reste sans doute limité.

D’autre part dans certains registres, au moins jusqu’au milieu du XVIII° siècle les sépultures d’enfants probablement jusqu’à l’âge de la communion ne sont pas enregistrées. On se demande pourquoi ? Le rapport entre le nombre de décès et celui des naissances ne peut donc pas être pris en compte pour juger de la démographie. C’est le cas à Massay pendant une certaine période.

Signalons aussi que dans quelques cas, le curé baptise ou pratique l’inhumation de personnes qui ne sont pas de la paroisse. C’est pourquoi il ne faut pas se fier au bilan qui souvent clôture l’année, mais relever ligne par ligne l’acte enregistré pour établir des statistiques les plus exactes possibles.

Enfin les documents que nous avons consultés ne concernent que les familles catholiques. Toutefois à Massay il est permis de penser que la quasi-totalité de la population était concernée, ce qui n’était pas toujours le cas dans d’autres régions ou de grandes villes. Ainsi à Massay on peut considérer que le nombre de baptêmes correspond au nombre de naissances et permet avec une bonne approximation de connaître la population de la paroisse.

Pour calculer cette population l’abbé Expilly, un démographe de la deuxième partie du XVIII ° applique un coefficient permettant d’estimer la population globale. Ce coefficient est variable suivant divers critères dont la taille de la paroisse et de la ville. Il évolue entre 23,5 et 33 selon Expilly, mais le nombre applicable aux paroisses moyennes est celui de 25,5. Nous avons retenu la multiplication par 25 de façon à donner seulement un effectif plancher qui, selon les nombreuses études avec recoupement que nous avons pu faire ailleurs, est très proche de la réalité.

Notons cependant que pour donner l’effectif de population des Deux-Sèvres en 1802, le préfet Dupin applique le coefficient 33. A l’évidence il a donné une estimation très exagérée. Mais les préfets avaient intérêt à gonfler le nombre de leurs administrés pour être mieux écoutés et bénéficier de subsides plus importants.

Le nombre 25 appelé « coefficient d’Expilly » est reconnu par la majorité des démographes comme le plus valable pour les paroisses rurales. Quant au nombre de naissances, il doit être établi sur la moyenne de dix années consécutives pour tenir compte d’éventuelles fluctuations. La France a en effet subi des années noires qui ont eu des conséquences importantes sur sa démographie. Les plus meurtrières ont été 1693-1694 avec 1,8 millions de morts, 1709-1710 une année de grands froids comme 1739-1740 d’où vient l’expression « je m’en moque comme de l’An 40 ». Mais les années précédant la Révolution ont été aussi très difficiles. Maladies et période de grands froids donc famines venaient doubler voire quadrupler le nombre de décès dans certains villages.

Massay a été touché par ces années difficiles. En 1783 on décompte 47 décès pour seulement 25 naissances. En 1785, 62 décès pour également 25 naissances. Mais c’est en 1740 que les communes ont été le plus touchées. A Massay le décompte exact n’est pas possible car le curé n’inscrit pas les décès d’enfants, mais à Mauzé-Thouarsais on décompte 101 décès pour 24 naissances.

En utilisant le coefficient d’Expilly, on peut considérer que la population d’une paroisse où la moyenne est de 20 naissances se monte au minimum à 500 habitants avec une marge d’erreur de 5%. C’est sur cette base que seront donnés les effectifs de Massay jusqu’à la Révolution alors qu’ensuite ce sont les recensements qui font foi.

La démographie de Massay

Les tableaux présentés ci-après montrent que la population fluctue dans la paroisse plus qu’on pouvait le penser, et que malgré un taux de fécondité assez élevé, elle peut décroître en raison d’une mortalité plus importante encore.

C’est d’ailleurs le cas dans les premières années archivées. De 1723 à 1733 on compte 290 naissances seulement contre 359 décès, soit un déficit d 69 personnes et seule l’année 1726 présente un bilan positif.

La moyenne des naissances étant de 28,8 on peut affirmer que la population atteint à cette époque au moins 720 habitants. Mais le déficit des naissances aura des conséquences de longue durée.

Dans la période prérévolutionnaire de 1779 à 1788, la moyenne des naissances est seulement de 23,8, ce qui amène à considérer que la population de Massay est seulement de l’ordre de 600 habitants. Cette période est d’ailleurs catastrophique au plan du rapport naissances/décès. On y enregistre 408 décès pour seulement 246 naissances.

Le constat du déclin au cours du XVIII° peut paraître étonnant, mais des comparaisons avec Bouillé-Saint-Paul montrent que là aussi la population a sévèrement diminué pendant ce siècle et dès 1690. La population en un siècle est passée de 600 personnes à environ 500. Le même constat de déficit a été fait à Cersay et Argenton l’Eglise et on sait que Thouars a également vu sa population sérieusement diminuer. S’il y eu un certain déplacement de population, il n’a en rien modifié le constat : c’est pour l’essentiel ce décalage entre les naissances et les décès qui explique les différences.

Les mouvements de population, dans la région, se font essentiellement du Nord vers le Sud. Les Mauges plus que le Poitou vont contribuer à combler très partiellement le déficit des naissances. L’étude de la généalogie de quelques familles du secteur le confirme.

Cette dégradation régulière de la situation démographique va être bouleversée à Massay par la Révolution et les évènements de la guerre de Vendée comme nous l’expliquerons au chapitre 6.

A partir de l’année 1800 ce sont les recensements qui permettent de suivre l’évolution de la population. Encore faut-il, semble-t-il, prendre certains résultats avec précaution. Rien n’explique certaines données. Ainsi les recensements indiquent en 1800 619 personnes et 642 en 1822 soit un bilan positif de 23 personnes. Or l’analyse des registres indiquent pour cette période un déficit des naissances de 78 personnes. Les recensements de cette période ne sont pas vraiment fiables à Massais dans cette période ; il est vrai cependant que depuis la Révolution les populations bougent beaucoup plus.

Notons dès maintenant que la population va encore croître et atteindre son pic sous le Second Empire en 1861 avec 820 habitants, avant de diminuer à nouveau.

Chapitre 5 : Bourgs, Villages et Hameaux.

Les renseignements donnés par les différents documents sont souvent trop imprécis pour avoir une image certaine de la configuration de la paroisse sous l’Ancien Régime.

Le cadastre Napoléonien permet de se faire une meilleure idée de la répartition des habitations au début du XIX°, mais la Révolution a fait son œuvre. Il semble qu’elle ait fait quelques modifications, destructions de bâtiments dont à coup sûr le prieuré de Vaucouleurs, déjà depuis longtemps transformé en ferme. En revanche le bourg s’est probablement développé.

S’il est difficile de donner un relevé précis et complet des habitants de Massay à une date donnée et de préciser leur profession, il est intéressant de distinguer métayers, bordiers, journaliers et autres professions ; c’est pourquoi un petit rappel de leur signification n’est pas inutile.

Le mot « fermier » au XVIII° n’a pas la même acception que maintenant. C’est un gérant de propriétés agricoles. Il a été choisi par le propriétaire pour le représenter auprès des métayers ou bordiers. Il loue les propriétés au propriétaire et s’en attribue les droits aux revenus. Il a donc une certaine instruction. C’est le cas de Louis Jaudonnet qui est fermier des terres de Vaucouleurs et a été choisi comme syndic de la paroisse. S’ils peuvent habiter sur les terres, fréquemment ils demeurent au bourg.

En même temps qu’il assure une fonction de gérance, le fermier est souvent commerçant ; c’est-à-dire qu’il assure le commerce de bestiaux. Etre fermier est un tremplin social. Les enfants pourront recevoir une meilleure éducation et se placer chez un notaire ou dans des emplois plus bourgeois.

Le « métayer » a un contrat précis avec un propriétaire ou son fermier. Celui-ci fournit le matériel et le bétail, au moins en partie et garde une part, souvent la moitié, des récoltes. Les métairies peuvent être étendues sur plusieurs dizaines d’hectares. Le métayer emploie donc des journaliers et des domestiques. Le mot « laboureur » est souvent employé dans la région pour désigner un métayer. On le trouve rarement dans les registres de Massay.

Le « bordier » peut être propriétaire ou locataire d’une petite parcelle de terrain n’excédant pas au mieux une dizaine d’hectares, et souvent n’en comportant qu’un ou deux, la capacité de culture d’un homme possédant un bœuf et le matériel de base. Le bordier est propriétaire de son bœuf et de son matériel. Les bordiers à Massay habitent dans les villages (en réalité des hameaux) car il y a très peu de borderies isolées. Quelques-uns d’entre eux habitent le bourg et cultivent probablement les terres qui en sont proches. Alors que les métayers ont à Massay une stabilité certaine, les bordiers changent souvent d’habitation. Sans doute profitent-ils de toutes les bonnes occasions pour se fixer sur de meilleures terres.

Le « journalier » est, comme son nom l’indique, employé à la journée par un fermier ou un métayer en fonction des besoins. Mais une certaine stabilité d’habitation semble indiquer qu’ils sont régulièrement employés sur les mêmes terres et qu’ils ont leur propre maison ou peut-être vaudrait-il utilisé le terme « masure » car ils sont au bas de l’échelle sociale et très démunis.

A Massay, ce sont les bordiers et les journaliers qui sont les plus fréquemment rencontrés, mais chaque grande propriété a son métayer. Dans chaque moulin on trouve un ou plusieurs meuniers avec une grande stabilité familiale. Quant au bourg les registres montrent qu’il abrite aubergistes, cabaretiers, charrons, maréchaux, maçons et bien sûr les employés de la gabelle.

Parmi les auberges, l’une au moins existait dans la demeure actuelle située au n°1 de la rue de l’église. Quant au beau bâtiment appelé Le Logis, il avait été la demeure de la famille De Vaucouleurs, mais il est probable qu’il fut ensuite transformé en auberge et relais de poste et, nous l’avons dit, qu’il hébergea sans doute les gabelous et leurs familles. Il y avait naguère dans ce Logis une très belle cheminée et à l’étage le sol était couvert de petits pavés donnant à la grande salle un caractère exceptionnel.

Quelle que soit leur profession les habitants de Massay ne sont pas très riches. La terre est pauvre. C’est ce qu’on appelle communément « une terre à gendres » de celles qu’on donne volontiers à ses filles pour les marier ! Cette terre a valu le surnom peu flatteur « des gueux de Massay » à ceux qui y vivent. Le préfet Dupin dans son ouvrage sur les Deux-Sèvres souligne cette pauvreté.

Dans le domaine de la propriété la Révolution va bouleverser l’ordre des choses. Bien des terres qui appartenaient à l’Eglise, à des ordres religieux ou à des familles nobles ont été déclarées Biens Nationaux et ont été vendues. D’autres l’ont été par nécessité. Nombre d’habitants se déclarent « propriétaires » à l’état-civil. A l’exception de quelques-uns, il est très improbable qu’ils aient vécu en rentiers sur leur propriété. Ce sont plutôt des métayers qui ont acquis leurs terres ou surtout des bordiers qui affirment ainsi une liberté que la Révolution a favorisée et une position sociale que la redistribution des terres a valorisée.

Ainsi les Tailcourt étaient déclarés bordiers à La Brosse Galete, Pierre Tailcourt se déclare désormais propriétaire en ce lieu. Les Cornu, Aubineau, Pineau ou Billy noms bien connus dans la commune se déclarent aussi maintenant « propriétaires ». Mais les seuls gros propriétaires demeurant sur leurs terres à Massay sont Benjamin Marillet à la Davière, la famille Suire qui posséde à la fois le Moulin Neuf et le Moulin Chotard, les Jaudonnet, et les Sorin propriétaires du Moulin Bernard et de ses dépendances.

Les grands bénéficiaires de la Révolution par acquisition de biens nationaux ou achats de terres quittées par leur propriétaire sont les Barion de Bressuire, les familles Coiteux, Pihoué et Chaillou de Thouars. C’est aussi, plus étonnant, le sieur Menoux qui est curé de Thouars et possède Poinot et La Foucherie ! Les Roussières la belle propriété qui appartenait aux De Rangot qui ont émigré a été divisé en deux, la métairie et la gentilhommière.

Au bourg, on trouve davantage de métiers du bâtiment, les maçons vont se multiplier au fil des ans, le boulanger qui est apparu à la fin du XVI°, le buraliste et les cordonniers s’ajoutent aux sabotiers. Des magasins s’ouvrent au fil du temps. On voit apparaître les noms de « marchand » et « marchande » mais aussi un boucher et un deuxième boulanger. Visiblement le commerce se développe, l’argent circule davantage. Le garde champêtre est omniprésent, témoin lors des décès et souvent des naissances, mais un instituteur ne sera cité pour la première fois que sous le Second Empire. Il s’appelle Fournier et son épouse Louise Boismoreau (le nom d’une ferme) est couturière. L’école a dû être créée tardivement par rapport à certains villages voisins et en 1870 beaucoup d’habitants ne savent pas encore écrire.

Parmi les autres métiers, des tisserands sont répertoriés ainsi qu’un faudeur (plieur de toiles), un foulonnier (artisan qui foule le drap), un chaulier et un blattier (vendeur de grain au détail)

Les Villages et les Métairies.

Massay comme toutes les communes du bocage se caractérise par son habitat dispersé. Il y a au XVIII° près de trois fois plus d’habitants dans les écarts que dans le bourg. Dans ce domaine aussi Massay peut être considéré comme « un village frontière » entre ce qu’on a coutume d’appeler « la plaine de Thouars » et le pays de Bocage. Les hameaux dès qu’il existe deux maisons sont appelés « villages »

Au bourg on distingue environ 70 bâtiments cadastrés, donc moins de 70 habitations alors que le total des habitations des villages ou hameaux et métairies isolées dépasse 140.

Les villages les plus importants donc les plus habités sont La Rétière, Les Defoye ( à l’orthographe très variable), La Brousse Gallet et Bapteviande mais Pierrois, Haute et Basse Brosse Audebert forment aussi des hameaux bien peuplés. Rien ne prouve dans ces villages l’existence de maisons importantes évoquant la richesse d’un fermier ou métayer. En revanche Vaucouleurs avant sa destruction, La Carie, La Roussière, La Richard et La Davière sont des demeures conséquentes parfois occupées par des personnalités de Massay.

La personnalité la plus marquante de Massay au XVIII° siècle est certainement Gabriel De Rangot. Il est écuyer du Roi et habite La Roussière. Mais la famille De Rangot disparaîtra de Massay à la Révolution. Gabriel De Rangot a émigré. L’autre famille importante est celle des Marillet que nous avons déjà évoquée.

AUX DE FOIS : (une dizaine de bâtiments selon le cadastre Napoléon). Cette orthographe en trois mots est la première qui apparaisse dans les registres avec « Les de fois ». Selon Gustave Michaud, le nom aurait pour origine « duo fagus » et signifiait les deux hêtres. Quoiqu’il en soit les orthographes les plus fantaisistes vont se succéder avant l’adoption définitive actuelle : Audefois. C’est un village assez important où cohabitent plusieurs familles métayers et bordiers cultivant essentiellement la vigne. L’une de ces familles y a vécu dans la continuité : Les Nombalais.

BASTEVIANDE ou BAPTEVIANDE : (15 bâtiments dont au moins dix habitations)

Malgré cette dernière orthographe qui évoque le baptême et laisserait volontiers croire qu’il s’agissait d’un lieu où des cérémonies à caractère religieux étaient célébrées pour le bétail, il est plus probable que le préfixe vient du mot latin signifiant « enclos » Les écritures Basteviande ou Bataviande que l’on trouve parfois semblent le confirmer. Comme Audefois, Bapteviande abrite une dizaine de famille sans qu’il y ait a priori continuité sur plusieurs générations.

La Barbotinière (3 bâtiments): C’était une métairie qui dépendait  de Vaucouleurs. Elle ne barbottait dans l’eau puisque située sur une hauteur. Elle avait un temps appelée Villeneuve. L’origine du nom vient sans doute du verbe « barboter » qui signifie marmotter, grommeler. Comme « barboteur » est celui qui parle entre ses dents. Sans doute un propriétaire avait ce défaut ?

La Brosse Audebert (environ 15 bâtiments) : Le mot « la Brosse » est régulièrement utilisé ici jusqu’au milieu du XX° siècle avant d’être remplacé par La Brousse. On distingue déjà Haute et Basse Brosse, mais les rédacteurs des actes ne sont pas toujours très précis. Mathurin Landais y vit en 1724 et c’est l’un de ses descendants qui y est indiqué comme propriétaire un siècle plus tard.

La Brosse Gallet (environ 15 bâtiments) : Si cette orthographe domine, on trouve aussi la Brosse Galet ce qui semble indiquer la manière dont se prononçait le nom. On y trouve les noms fréquents à Massais de Puchault, Penault, Cornu ou Taillecourt qui au XIX° y sont propriétaires.

La Burnière (4 bâtiments) : Ce devait être une grande métairie. L’origine du nom est inconnue. Dans le cas présent, aucune origine commençant par « Burn » n’est satisfaisante. Il faut sans doute chercher l’origine dans les mots du vieux Français : Berner = vanner les céréales ou Bernage = redevance en son versée par des vassaux. C’est un Pineau qui y est métayer en 1798.

La Carie (3 bâtiments) : Ce serait un fief très ancien dépendant des seigneurs d’Argenton. Le mot vient probablement du vieux français « cairon » qui signifie « pierre » et des mots latins qui l’ont précédé et ont engendré « carrière » par exemple. Des pierres venant de La Carie étaient utilisées pour certaines constructions dans le bourg de Massay.

La Davière (6 bâtiments à une époque) : C’est une gentilhommière doublée d’une ferme et de plusieurs terres occupant bordiers ou métayers. Au XVII° siècle, la terre de la Davière appartenait à la famille Cathelin. C’est par son mariage avec Magdeleine Cathelin que Claude Marillet, avocat, deviendra Seigneur de La Davière.

Une anecdote concernant la famille Marillet mérite d’être contée. Dans les registres on découvre que Claude Marillet épouse, à Sainte Radegonde en février 1773, Anne Ogeron de Ligron, fille de Louis François Ogeron Seigneur de Ligron, une grande famille du Thouarsais.

Bizarrement aucun membre de la famille Marillet n’assiste au mariage, ni sa mère, ni son frère, ni sa sœur ! La chose paraissant surprenante des recherches complémentaires m’ont permis de découvrir qu’en 1771, le 4 Mai, Anne Ogeron avait accouché d’une fille illégitime, née de père inconnu à Ligron et enregistré par une sage-femme de Sainte Verge. L’enfant prénommée Anne Françoise avait ensuite été accueillie à Massay en nourrice chez un nommé Dubois et ne survivra que quelques mois.

Par la suite la famille Marillet recevra Anne à La Davière. Le couple aura trois enfants dont un, également prénommé Claude, aura un destin tragique guillotiné à Niort. C’est donc par erreur que Maurice Poignat indique que Claude, le guillotiné, était fils unique. Il ne peut faire une confusion avec son père décédé en 1785.

La Foucherie : Le nom n’a été relevé qu’à la fin du XVIII°. Cela n’implique pas qu’elle n’ait pas existé plus tôt. Cette borderie se trouve sur le chemin d’Ulcot en limite de paroisse.

La Ginchère (3 bâtiments) : C’était une métairie. Le nom initial évoque les joncs ; il a évolué avant de devenir Les Inchères. On y trouve le nom de Bodet au XIX° et il a appartenu à la famille De Maupassant.

La Mainie : C’était une grosse métairie (6 bâtiments dont deux petits). Le nom a probablement la même origine que le mot « mesnil » et désigne une maison plus qu’un village bien que ce mot soit utilisé par les curés et que deux ou trois familles y cohabitent.

La Maltière : Le mot n’apparaît dans les registres d’état-civil qu’en 1820, mais dans son étude des Deux-Sèvres, sous le Consulat, Le préfet Dupin indique l’existence d’une tuilerie à Massais. Cette tuilerie devait porter ce nom, repris ensuite par l’exploitation agricole. En effet les deux premiers habitants cités, Guiteau et Bréchelier, sont des tuiliers. Une tuilerie en ruine se trouve en effet non loin de la propriété actuelle.

La Parionnière (3 bâtiments) : Bien que l’appellation actuelle soit La Pardonnière, il n’y a aucun doute sur l’écriture ancienne dans les actes. Quant à la carte de Cassini elle écrit « La Péronnière ». L’origine du nom n’a donc rien à voir avec un éventuel pardon.

La Retière : L’orthographe actuelle « La Rhétière » ne répond à aucune logique. Elle n’est d’ailleurs apparue que dans la deuxième moitié du XIX°. Le premier écrit connu date du XV) et cite « La Restière ».

Comme des vestiges gallo-romains y ont été découverts, le mot a probablement son origine dans le verbe « restare » qui signifie « s’arrêter » et est à l’origine du verbe « rester » synonyme autrefois « d’habiter ». Naguère encore on entendait souvent dire « je reste à… » ce qui indiquait le lieu d’habitation.

C’est un village assez important de plus de 30 bâtiments et on y trouve d’autres professions que cultivateurs. Il a existé un prieuré à La Restière comme nous le verrons plus tard, mais nous n’avons pu identifier son implantation.

La Richard : Ce nom indique sans doute que l’un des premiers habitants s’appelait Richard plutôt qu’il était riche. Il s’agit ici d’un village d’une certaine importance où cohabitent de cinq à dix familles. Cela tient sans doute au fait qu’il se trouve sur le chemin de Saumur à La Rochelle. On y retrouve plusieurs noms familiers à Massais dont ceux de Guéret et Billy.

La Roussière : C’est avec La Davière la propriété la plus importante de Massay. Nous l’avons évoqué à propos de la famille De Rangot. Quand on voit son état actuel, il est difficile d’imaginer la belle gentilhommière qu’elle a été.

Le Magny : C’est une métairie ou borderie isolée dont le premier occupant connu est Charles Clochard (1728) mais on y trouvera aussi d’autres noms bien connus comme Bitaudeau, Goria, Naud et Billy.

Les Brulletières (2 bâtiments) : le nom est devenu « Les Brunnetières », mais à l’origine il a sans doute la même origine que Le Breuil et est donc lié à la présence d’un bois. Plusieur familles y cohabitent au début du XVIII°, mais son importance semble diminuer par la suite.

Les Jallières : On distingue Hautes et Basses (ou petites) Jallières. Le mot vient probablement de l’ancien français « jalaie » qui indiquait une mesure agraire, mais il peut aussi venir de jallier : un bâton.

Pierrois transformé en Piedroy : Un village assez important dont le nom vient sans doute d’un terrain pierreux. Assez isolé, les familles Pellerin et Metais en particulier y habitèrent pendant plusieurs générations.

Poinault ou Poinot ; les deux orthographes étaient utilisées ce qui n’a rien d’étonnant. Plusieurs métayers et bordiers y étaient installés.

Vaucouleurs : L’ensemble était constitué de deux ailes de chaque côté de la chapelle. Elle avait pour origine le prieuré dont nous parlerons plus tard.

Vieux Pont : cinq ou six constructions constituaient Vieux Pont. Y vécurent des familles Girardeau, Gourdon, Puchaud et Billy. Le village est situé sur les hauteurs mais le mot « pont » se justifie car il domine un passage sur l’Argenton où existe actuellement une passerelle et y est relié par un chemin.

LES MOULINS 

Le Moulin Bernard : Il y a en fait trois moulins Bernard, l’un à eau et les deux autres à vent. On sait qu’il faut deux moulins à vent pour obtenir le rendement d’un moulin à eau, cependant tous les propriétaires de moulins à eau ne possédaient pas deux moulins à vent

 Seul le moulin à eau est habité. Il ne reste malheureusement rien du moulin proprement dit qui semble d’après une gravure ancienne avoir été imposant. Il reste encore, un peu en décrépitude, une maison d’habitation. Du moulin proprement dit, de la grange qui avait été transformée en guinguette puis en restaurant et du bâtiment joint, il ne reste que des ruines.  Un incendie a brulé en novembre 2011 ce qui existait encore.

Le Moulin Chotard : habité par un certain Pierre Pinont ? puis par une famille Pineau, il est situé en aval de la rivière et son moulin à vent était implanté sur les terres de la paroisse voisine.

Le Moulin Mercerot : connu ensuite sous le nom de Mercelot. En vieux français « mercerot » désignait un petit mercier ambulant. Villon a écrit un poème « Moy pauvre mercerot… » Certains en ont déduit qu’il avait effectivement rempli ce métier ce que rien ne prouve. Il y avait deux moulins Mercerot, l’un à eau dont on ne trouve comme trace que la jetée dans le Parc de la Vallée, il a été détruit par un incendie en 1939. Seules de vieilles photos permettent de se faire une idée de son implantation. L’autre, le moulin à vent, est encore partiellement debout.

Le Moulin Neuf : situé en amont du moulin de Chotard, il appartint longtemps à la famille Suire, meuniers dans la continuité qui en devinrent propriétaires. Le moulin fonctionnait encore à la fin du XIX° siècle. Il a désormais disparu seule demeure une maison d’habitation.

Le Moulin Vieux : Un peu en amont du précédent et du pont, évidemment il n’a pas toujours porté le nom de « moulin vieux ». La première évocation de l’existence d’un moulin à cet endroit remonte à l’An 1060 ! Un autre document en latin reproduit par l’abbé Michaud date de l’an de grâce 1224 et évoque un contentieux gagné par les religieuses de La Fougereuse, propriétaires de Vaucouleurs.

Dans un autre document il est appelé « Moulin des Planches de Vaucouleurs » ayant appartenu à l’abbaye de Chambon, la plus importante de tout le secteur, propriétaire de tous les moulins depuis le Moulin Neuf jusqu’au pont de Preuil.

Précisons que si tous les moulins à eau comportaient une habitation, il n’en est pas de même des moulins à vent qui sont donc plus difficiles à identifier. On peut en identifier 6 sur la carte de Cassini, le préfet Dupin en signale 7, mais il ne parle sans doute que des moulins en état de fonctionnement. Il semblerait qu’il y en eut 9 sur la paroisse.

Enfin signalons l’existence à une date indéterminée d’un moulin à eau appelé « Le Moulin du Chêne ». Il se trouvait entre le Moulin Neuf et celui de Chotard. On peut encore deviner des traces de chaussée.

Le Bourg de Massay : Il est difficile de définir exactement ce qu’était le bourg de Massay. Le cadastre Napoléonien permet de distinguer quelques grandes maisons et une soixantaine de petites mitoyennes et bien sûr l’église et le cimetière qui se trouve devant. On voit aussi à proximité du bourg vingt petites parcelles qui devaient être des jardins potagers cultivés par des habitants du bourg.

Si l’on ne trouve pas dans la liste donnée des villages, borderies et moulins comme « Le Pain Bénit, Les Douves Chaudes, Les Chambres, Les Varannes etc… » C’est que nous n’avons pas trouvé d’information sur ces lieux au XVIII° siècle.

L’église :

La première église de Massay daterait du XVII° siècle. Elle a été transformée au cours des siècles.

 Au XVII° un rapport expose que l’église est en bon état, avec un calice et un ciboire d’argent et un tabernacle nouveau. Mais dans les archives de Thouars, on trouve un compte-rendu d’une visite de l’archiprêtre de 1728. Il signale une église en mauvais état la pluie tombant sur le tabernacle et indique que la paroisse est trop pauvre pour pouvoir effectuer les travaux.

Les chapelles, prieurés et calvaires :

Selon François Semur auteur d’un ouvrage sur les abbayes et prieurés de l’ancienne France, il aurait existé à Massay deux prieurés. Celui de Massay et celui de Vaucouleurs dont on ne saurait rien. Cela est vrai pour celui de Massay mais faux pour Vaucouleurs,

Vaucouleurs : Le nom de « Vaucouleurs » en ce lieu vient du fait que les terres appartenaient initialement à une famille de ce nom. Le terme est considéré comme trouvant son origine dans le latin « val colores » ou « valle colorata » les deux expressions existent dans les plus anciens documents.

Il y avait à Vaucouleurs un prieuré tenu par des religieuses donc une chapelle, mais aussi une métairie et sur les trois moulins à vent situés au-dessus du Moulin Vieux, l’un au moins appartenait au prieuré. Certaines sources le décrivent situé « au creux des montagnes ». N’exagérons rien, mais en effet le prieuré est situé dans la vallée à l’Est du pont,  dans le méandre du petit ruisseau qui se jette dans l’Argenton en aval du moulin.

Vers l’an 1100, la chapelle de Vaucouleurs appartenait à l’évëque Raoul de Fustaye qui l’a cédé aux Bénédictines de La Fougereuse qui y fonde le prieuré, tenu par quelques religieuses de cet ordre.

Dédiée à Saint Jean, la chapelle était un vaste édifice dont le chœur faisait 30 pieds de long sur 25 de large et la nef 70 pieds sur 35 de large. Outre l’autel principal, il existait un deuxième autel dédié à Saint Eutrope qui était vénéré car il guérissait les « estropiés » et les fiévreux. Un grand pèlerinage des habitants de Massay à Saint Eutrope se déroulait chaque premier dimanche suivant sa fête (le 30 Avril). Si les messes et les pèlerinages ont continué jusqu’à la Révolution dans la chapelle, les religieuses avaient abandonné le prieuré pendant les guerres de religion et il avait partiellement été endommagé, mais la métairie était demeurée.

Au prieuré était rattaché la métairie de La Barbotinière et celle de La Sorinière, appelée « le poirier du malheur » car des gens y avaient été assassinés.

La chapelle et les bâtiments attenants ont été brulés partiellement pendant la Révolution et les habitants de Massais les plus anciens se souviennent avoir connu des ruines encore bien visibles. Ce n’est plus le cas.

Le prieuré de Massay.

Comme il a été dit plus haut, aucun document ne permet d’identifier un prieuré à Massay. Certes il existe au bourg un bâtiment que les habitants ont coutume d’appeler « le couvent » car des religieuses y ont un temps tenu une école, mais rien ne prouve qu’il ait été un prieuré.

En revanche des actes officiels du début du XIX° siècle indiquent qu’un enfant abandonné a été trouvé devant « le prieuré de La Rétière ». C’est peut-être là qu’a existé le prieuré de Massais. Nous n’avons pu identifier le lieu exact, mais il devait être assez central car l’abandon d’un enfant visait à ce qu’il soit rapidement trouvé.

Les Chapelles :

Au nombre de 6 ou 7dont le nom est connu, mais pas toujours l’implantation. Elles ne sont pas forcément des bâtiments importants, certaines d’ailleurs étaient de petits autels, situés dans l’église et financés par quelque riche paroissien. D’autres étaient sans doute de petits édicules abritant la statue d’un saint vénéré. Mais aux chapelles sont liées des terres de rapport ce qui explique pourquoi certains noms sont connus.

La chapelle des Sarragots. 

Le nom de cette chapelle était connu, mais pas son implantation. Récemment, on savait seulement qu’elle avait l’évêque pour collateur et un revenu de 40 livres.

Le hasard un jour m’a fait découvrir des ruines oubliées dans les côteaux Bien cachées dans la végétation et par de grands arbres, d’accès difficile ces ruines consistent en une étroite pièce centrale flanquées de deux autres plus spacieuses, les murs du fond étant seulement la paroi d’une petite falaise. Il y avait matière à recherches. Les fouilles autorisées par les services officiels ont permis de découvrir que seule l’étroite pièce centrale avait été couverte de tuiles ; les autres probablement de chaume dont il ne restait aucune trace. Une de ces tuiles (tige de bottes) pas trop abîmée présentée à un expert a permis ce constat « Il n’est pas possible de dater les tuiles, mais nous n’en avons jamais vu de si mal faites ! »

Le mystère restait entier lorsque quelques années plus tard, aux archives départementales en consultant le relevé de la vente des biens nationaux est apparu la vente des terres des Sarragots avec 11 boisselées de côteaux dont l’implantation couvre l’emplacement des ruines. Le mystère de ces ruines était levé, mais c’est la seule chapelle réellement identifiée.

On sait aussi que la chapelle Saint-Roch était à La Richard , la chapelle Saint-Mathurin à La Roussière et qu’il existait une chapelle appelée du Vieux Pont.

Chapitre 6 : Une VIE, Naissances, Mariages Décès.

Chacun sait que la vie autrefois était très dure dans les campagnes et ne s’est améliorée que lentement au XIX° surtout dans la deuxième du siècle.

Les données chiffrées confirment à Massay la difficulté de cette vie qui conduit souvent les gens à se rendre au cimetière ; mais elles infirment certaines idées reçues comme l’existence de familles nombreuses ou les mariages essentiellement dans la paroisse.

Après avoir présenté quelques données sur l’espérance de vie, nous évoquerons chacune des grandes étapes de la vie, naissance, mariage, décès puis suivrons le parcours de 25 couples choisis au hasard.

L’espérance de vie

On estime souvent que l’espérance de vie était à l’époque considérée de 35 ans environ. Cette moyenne chiffrée n’a aucune réelle signification quand on étudie l’âge des décès dans la paroisse.

Au XVIII° siècle un enfant sur trois ne passe pas l’année, plus de la moitié des décès enregistrés concernent des enfants de moins de cinq ans. Ces chiffres sont éloquents et expliquent pourquoi il y a peu de familles nombreuses. Peut-on parler d’espérance de vie pour des êtres qui ne savent pas ce qu’est l’espoir ? Avec ce calcul, à peine 10% des personnes atteignent 50 ans.

Il nous a paru plus intéressant de calculer l’espérance de vie des jeunes ayant atteint la puberté. Il s’avère qu’il n’existe qu’une différence de 6 mois entre les garçons et les filles ; tous deux ayant alors une espérance de vie jusqu’à 50 ans.

En dehors de Pierre Meslé dont la longévité exceptionnelle a été évoquée, on peut considérer que dépasser 75 ans est un exploit.

Naissances et baptêmes

Au XVIII° siécle il n’existait pas de sage-femme à Massay, pas plus que dans la majorité des petites paroisses. L’accouchée était assistée d’une « matrone » choisie pour son expérience et sa personnalité. Souvent c’est le curé qui choisissait cette femme car il devait avoir une confiance absolue en elle. C’est elle qui se chargeait de baptiser l’enfant en danger de mort et témoignait qu’il avait vécu. Dans beaucoup de paroisse d’ailleurs le curé cite le nom de cette matrone. Ce n’est malheureusement pas le cas à Massay.

A l’accouchement n’assistent que des femmes plus ou moins nombreuses. L’hygiène est forcément réduite compte-tenu des possibilités de l’époque, mais des linges propres ont été préparés ainsi que de l’eau, ne serait-ce que pour baptiser le bébé si nécessaire. Tout est fait pour que l’enfant ne soit pas condamné à errer dans les limbes.

Un évènement relevé dans la paroisse de Saint-Aubin de Baubigné est révélateur de cet état d’esprit et je ne résiste pas au plaisir de le relater.

En 1729, le curé déclare avoir enterré un enfant mâle, fils du marquis de La Rochejacquelein et de son épouse défunte Marie Esther Faveau de Mortemer « la mère du sein de laquelle il a été tiré vivant et a reçu le baptême par les mains du professeur Jahan  (et de deux autres médecins) demeurant à Mortagne. » Les césariennes étaient connues à l’époque, mais sur une personne décédée, cela paraît surprenant. L’enfant était-il vraiment encore vivant ? S’agit-il d’un pieux mensonge ? L’acte est de toute manière révélateur et il est amusant de découvrir ce nom de La Rochejacquelein dans ces circonstances.

Le pieux mensonge est sans doute aussi reproduit à Massay lorsque l’enfant est déclaré « mort à un jour » et a été baptisé au domicile.

Lorsque la naissance s’est déroulée correctement pour le bébé les épreuves ne sont pas finies pour lui. Il doit être conduit le jour même ou le lendemain à l’église pour être baptisé. C’est le père s’il est encore vivant, car il n’est pas si rare qu’il soit décédé dans les mois précédents la naissance, qui va porter l’enfant à l’église. Imaginez ce que peut être ce trajet dans le froid, sous la pluie ou la neige, de Poinault jusqu’au bourg… Il n’est guère surprenant qu’un certain nombre de décès soit enregistré chez des enfants de un à huit jours.

Il est évident que ce baptême rapide n’est pas une fête. La mère n’est pas présente. Y assistent le parrain et la marraine qui sont donc le plus souvent de la paroisse.

Les naissances s’étalent sur toute l’année avec un pic saisonnier entre Novembre et Février. La naissance de jumeaux n’est pas exceptionnelle mais avec une chance de survie encore amoindrie. Ainsi le 5 Novembre 1726, le curé enterre deux jumeaux nés et baptisés au foyer de René Métayer à La Mainie. Il ne précise ni sexe ni prénoms.

Les évènements heureux et malheureux peuvent se succéder rapidement au sein d’une famille. Au foyer de François Courtin au Moulin Bernard, Françoise décède à l’âge de 4 ans le 23 novembre 1724, René y nait 4 jours après le 27, mais décède à son tour le 28. Les drames de ce genre sont légion.

La presque totalité de ces naissances sont légitimes. Les enfants naturels sont très rares. Le curé Meslé, pudiquement, indique « fils de … » il laisse un blanc avant de donner le nom de la mère. Par la suite on trouvera « né de père inconnu », mais dans certaines paroisses le curé exigeait que la jeune fille donne le nom du père et le précise. Par discrétion, certaines vont parfois accoucher dans une autre paroisse. C’est sans doute le cas de Rose Le Blanc, fille d’un notaire qui visiblement n’habite pas Massay. Elle accouche d’un garçon dans la paroisse en février 1785, né de père inconnu. L’enfant décède au bout de 5 jours et Rose épouse en Juin un huissier de Bressuire !

Si les naissances sont le plus souvent légitimes, il y a évidemment des mariages forcés par la nature des choses. Ainsi Nicolas Depoix épouse Renée Sicard en Juin 1787 et leur fille naitra le 24 Juillet…

L’abandon d’enfants :

Si les enfants naturels sont rares, l’abandon d’enfant est encore plus exceptionnel. On sait qu’à Paris et dans les grandes villes il existait des « boites à enfants » où une mère voulant abandonner son bébé pouvait le déposer. Mais à Massay, un abandon d’enfant fait discrètement est certainement difficile.

Au XIII ° siècle aucun abandon d’enfant n’est relevé, mais en Germinal de l’an X, Pierre Grolleau, métayer à La Ginchère a la surprise de trouver le matin sur le pas de sa porte un nouveau-né dans un panier. Alerté le maire note soigneusement les caractéristiques des linges qui enveloppent le bébé, constate que c’est un enfant mâle et lui attribue le nom de Pierre Ginchère. Cet enfant sera accueilli par une habitante de Massay mais décèdera malheureusement à l’âge de deux ans.

L’évènement est singulier mais reste un acte isolé alors que c’est à une véritable épidémie d’abandon qui est notée entre 1817 et 1820.

Le 10 décembre 1817, Mathurin Barrault trouve au pont de Massais un enfant abandonné qui sera appelé Pierre Dupont.

Le 1° février 1818, Pierre Gariau trouve au prieuré de La Rétière une fille. Elle est enregistrée sous le prénom de Victoire Valentium. Nous sommes le jour de la Saint Valentin.

Le 14 août 1818, Pierre Delay , bordier au bourg, trouve au cimetière une fille qui sera appelé Louise Lacroix.

Le 10 août 1819, Pierre Delay qui décidément est un lève-tôt trouve encore à la croix du cimetière une autre fille à qui sera donné le nom de Marie Sauveur.

Le 2 novembre 1819, à nouveau au prieuré de La Rétière, c’est Pierre Savarit qui découvre un garçon qui sera enregistré sous le nom de Prieuré René Toussaint.

Le 25 novembre 1819, Louis Chauvin découvre au moulin de la Chavesche ( ?) un enfant de sexe masculin auquel est agrafé un billet précisant qu’il doit être enregistré sous le nom de Philippe Marie Coudent.

Le 10 janvier 1820, Louis Martineau fermier à La Davière découvre près du Moulin Vieux un bébé emmailloté à qui sera donné le nom de Marie La Croisée.

Le 10 mars 1820, Jacques Gauriault trouve au carrefour des Fontenilles un enfant qui sera appelé Angélique De La Chanson.

8 jours plus tard, c’est au carrefour dit « des marchandises » un autre bébé est trouvé par François Rigalleau bordier à Audefois. Le nom qui lui est donné : Marie Magdeleine Fuir.

Le 9 juin, c’est au carrefour dit de Bouillé-Saint-Paul que Jean Doussaint, bordier au village trouve un bébé qui sera enregistré sous le nom de Perrine Dujasmin.

Arrêtons là cette liste mais quelques autres abandons seront notés. Massais est particulièrement touché par cette vague d’abandons, il y en a aussi quelques-uns mais beaucoup plus rares dans les villages des environs. Ainsi à Mauzé est trouvé un garçon qui sera appelé Duchemin qui est l’ancêtre d’une famille bien connue à Massais.

Il n’y a qu’à Thouars que les abandons ont toujours existé, une pratique qui avait cours avant la Révolution car le couvent du Hameau était connu pour accueillir les nouveaux nés. Mais on ignore s’il y avait une « boite à bébés ».

Notons que le plus souvent l’enfant qui est enveloppé dans quelques linges porte au bras un ruban de couleur. Il existe peut-être un code implicite, oublié depuis, qui indique que l’enfant a ou n’a pas été baptisé. Il est possible aussi que la mère ait conservé une partie de ruban qui pourra lui servir de preuve si un jour elle veut récupérer son enfant.

Il est surtout intéressant de se poser cette question : Pourquoi tous ces abandons ? La misère, la diminution de la ferveur religieuse, toute relative d’ailleurs, et la dégradation des mœurs ne sauraient justifier cette malheureuse série. Il est plausible et même certain qu’un recruteur de nourrices est passé dans le village. La méthode est connue et fonctionne régulièrement dans certaines régions, mais nouvelles à Massais. Le recruteur vante la perspective de trouver un emploi de nourrice bien considéré, bien rémunéré avec la perspective de vivre dans une grande ville essentiellement Paris. Il s’occupera de tout. Il a dû séduire un certain nombre de jeunes filles qui, pour pouvoir remplir cette tâche, devaient d’abord enfanter. C’est assez sordide mais on sait que cette pratique existait encore à l’époque. Une loi avait avant la Révolution interdit et condamné cette pratique, mais elle n’avait sans doute jamais été appliquée.

Les mères de ces enfants abandonnés sont-elles toutes de Massais ? Rien ne le prouve, mais on imagine mal une jeune accouchée marcher pendant des kilomètres pour abandonner son enfant. Et s’il y a des parents ou amis complices, les faits sont encore plus condamnables.

Avant de conclure ce chapitre des naissances, jetons un regard sur le choix des prénoms.

La ronde des prénoms

Avant la Révolution, alors que très peu de personnes savent lire et écrire et que les moyens de communication sont réduits, les prénoms se transmettent d’une génération à la suivante et chaque village a ses habitudes mais aussi parfois ses originalités.

Evidemment il y a des constantes. Partout dans la région, les prénoms de Jean, Jacques, Pierre et René sont répandus alors que chez les filles Marie et Jeanne prédominent.

Apparaissent cependant des spécificités souvent durables puisque les parents transmettent souvent leur prénom à leurs enfants si ce n’est celui du parrain ou de la marraine.

Les tableaux suivants présentent le pourcentage des prénoms relevés avant la Révolution à Massay et Sainte Radegonde et montre certaines différences selon les paroisses :

PrénomsMassaySainte-Radegonde
PierreJeanFrançoisLouisRenéJacquesMathurin22%15%13%12%8%6%5%14%22%6%12%12%21%2%

A Massay viennent ensuite les André et les Charles et bien que la paroisse soit dédiée à Saint Hilaire, nous ne l’avons trouvé que deux fois chez les garçons et une fois pour une fille, alors qu’à Nueil-les-Aubiers par exemple il représente 8% des prénoms tant chez les garçons que chez les filles.

Un constat assez semblable se remarque chez les filles.

PrénomsMassaySainte-Radegonde
MarieJeannePerrineRenéeFrançoiseLouiseJacquette26%12%11%10%6%4%3%27%20%8%3%2%4%6%

A Massais comme ailleurs il ne faut pas s’étonner du prénom de Jacquette, il est fréquent partout et celui de Jacqueline est encore inexistant. Au total nous n’avons trouvé que 26 prénoms différents dont aucun ne présente une réelle originalité. Cependant notons à Massay un nombre non négligeable de Catherine, prénom qui n’apparait qu’exceptionnellement ailleurs.

La Révolution ne semble pas à Massay avoir eu une grosse influence sur l’évolution des prénoms. Mathurin va passer de mode, d’autres vont apparaitre mais sans lien direct avec les évènements. Pas de Brutus comme dans certaines villes ni de Napoléon pendant et après l’Empire. Notons cependant qu’à Massais les prénoms de Louis et Louise connaissent un certain succès après la chute de la royauté dans la commune comme ailleurs. les prénoms deviendront plus variés avec le développement de l’éducation et de la lecture, sans atteindre l’originalité de prénoms désormais piochés à la télévision ou au cinéma.

Le mariage et le couple

Selon M Moheau « le premier devoir du citoyen est de subir le joug du mariage » Le mariage serait-il un esclavage ? Rien dans les registres ne permet de le penser, mais on sait que, dans le monde paysan, il était plutôt une obligation car la femme jouait un rôle essentiel non seulement pour assurer la descendance mais dans la vie quotidienne où, outre ses fonctions de ménagère, elle s’occupait des volailles et du bétail quand il y en avait et participait aux travaux des champs. Elles faisaient aussi la lessive, soit chez elle, soit au lavoir qui se trouvait au carrefour de la grande route et de celle qui mène à La Rétière. Ces lavoirs avaient autrefois été surnommés par les curés « l’enfer » sans doute voulaient-ils éviter que les hommes les approchent trop.

Le célibat même chez les hommes était mal vu.

A Massay comme ailleurs on se marie entre personnes du même milieu social. Domestiques et journaliers au bas de l’échelle, puis bordiers, métayers et marchands. La petite noblesse va chercher ses conjoints ailleurs.

Le mariage est le seul sacrement qui n’est pas, pour la liturgie, donné par le curé mais réalisé par l’échange des vœux entre époux. Certains curés ont sans doute quelques difficultés à assimiler cette particularité. Aussi les formules employées dans les registres varient. La plus fréquente, employée d’ailleurs par les curés de Massay, peut paraître surprenante ; ils écrivent « J’ai épousé X et Y »

Il n’est pas permis de se marier pendant les périodes de l’Avent et du Carême et les mariages se déroulent majoritairement en janvier-février et en juillet-août après les moissons et avant les vendanges.

Nous avons particulièrement étudié 25 couples choisis au hasard parmi les mariés de 1723 à 1726 et suivi aussi après son remariage l’un des mariés devenu rapidement veuf. Les résultats sont édifiants.

En premier lieu il ne faut pas se figurer des cérémonies de mariage heureuses avec parents et grands-parents comme de nos jours. Sur les 50 personnes concernées nous n’en avons trouvé que 6 dont les deux parents étaient encore vivants le jour du mariage, et aucune présence de grand-parent n’a été identifiée. Pour 21 des mariés, ils n’ont plus ni père ni mère.

En second lieu le nombre de veufs ou veuves concernés par ces mariages est important. 13 des mariés sont veufs ou veuves mais il n’y a que deux mariages où les deux conjoints sont dans cette situation.

Les pariages ne se font pas uniquement entre personnes de Massay. Pour dix d’entre eux l’un des conjoints n’est pas de la paroisse. Trois sont de Bouillé-Saint-Paul, les autres sont de Moutiers, Mauzé, Missé, Boesse ou La Coudre. Deux des couples ont eu besoin d’une dispense de l’évêque ce qui prouve qu’il y avait entre eux un lien de parenté.

Pour six des couples il y a incertitude sur leur installation dans la paroisse, mais pour les dix-neuf autres il n’y a aucun doute, ce qui permet de penser que le mariage était majoritairement célébré dans la paroisse où le couple allait s’installer et non dans celle de la jeune fille comme le laisse entendre la tradition.

Un seul couple n’a pas d’enfant sans que le décès rapide de l’un des conjoints en soit la cause. En revanche Hilaire Meslé est décédé en février 1725 après avoir épousé Marie Guillot en juillet 1724. Celle-ci n’aura pas eu d’enfant de ce premier mariage.

Louis Girardeau et Mathurine Rouc mariés en 1726 décèdent tous les deux en 1727.

Quant à Mathurin Rigaudeau marié en 1725, il verra mourir son épouse Valentine Roy en 1727 sans que celle-ci lui ait donné un enfant. Mais elle a une bonne excuse : elle avait 50 ans à son décès donc 48 à son mariage. Mathurin est un peu plus jeune, il avait alors 44 ans, se remariera dès 1728 en choisissant une femme beaucoup plus jeune ; Françoise Naye n’a que 18 ans.

Ce mariage a probablement été l’occasion d’un « charivari ». Cette coutume consistait à accompagner les nouveaux mariés par un concert de bruit et de chahuts les plus divers lorsque le couple semblait mal assorti ou le mariage inopportun. La différence d’âge en était souvent la cause. Mais ce couple aura un destin assez extraordinaire. Françoise donnera à Mathurin dix enfants. On ne peut savoir combien vivront ensemble à la maison car comme je l’ai signalé à partir de 1734 le curé ne note plus les décès d’enfants.

Si ces 10 enfants ont tous survécu, ils constitueront la famille la plus nombreuse enregistrée. Le dernier enfant nait en 1749, Mathurin a donc 66 ans. Ce n’est pourtant pas un record. Pierre Guéret, métayer à La Davière fera enregistrer la naissance de sa fille alors qu’il a 72 ans.

 Mathurin Rigaudeau pour sa part décèdera à 90 ans et aura l’honneur d’être enterré sous le ballet de l’église devant la porte principale comme l’a été son épouse 3 ans plus tôt. Ils étaient à coup sûr bienfaiteurs de cette église.

Deux des couples étudiés n’ont qu’un enfant, mais pour l’un d’eux l’épouse Marie Chiron décèdera en avril 1725 après avoir accouché d’un garçon décédé lui aussi.

Une autre épouse prolifique est Marie Chamard mariée en 1725 à Mathurin Rigalleau. Elle aura 9 enfants dont le dernier en 1746, mais sur ces enfants l’un décèdera au bout de 15 jours, un autre à 3 mois…

Les autres couples ont au moins deux enfants souvent à intervalle rapide, mais pas toujours. Ainsi Jacques Pellerin et Jeanne Essoreau, mariés en 1723 ont un premier enfant seulement en 1733 et un deuxième en 1739 mais Jeanne décède des suites de l’accouchement.

La nature est parfois cruelle pour certains. Laurent Girardeau et Françoise Thibault auront 4 enfants, mais 3 d’entre eux ne passeront pas l’année. Laurent sera mort avant la naissance du quatrième enfant et Françoise décèdera des suites de l’accouchement.

Le sort de la famille de René Girard et Marie Gabilly est assez semblable, mais pour eux trois des quatre enfants décèdent dès la naissance et Marie Gabilly décèdera quelques mois après la naissance du quatrième qui a seul survécu.

Au total sur les 19 couples installés à Massay les seules familles nombreuses sont celles de Mathurin Rigalleau ( 9 enfants dont 3 décédés très jeunes), Mathurin Rigaudeau pour son deuxième mariage ( 10 enfants dont 3 au moins décédés très jeunes) ainsi que Charles Meslé et Renée Chamard (6 enfants dont 2 décédés jeunes). Les autres n’ont qu’un ou deux enfants qui survivent.

Une étude semblable a été faite au XIX° elle montre bien des constantes et quelques différences en particulier une plus grande mobilité. Mais nous entrons dans l’Histoire Contemporaine qui sort de la présente étude.

Les décès :

Nous avons vu précédemment, lorsqu’ils étaient enregistrés, que les décès d’enfants étaient fréquents. Aux inhumations, il est rare que le curé signale la présence de la mère et on ignore donc si elles y assistaient. Il est vrai que pour tous les actes enregistrés, à l’exception des baptêmes où la marraine est citée, ce sont essentiellement les hommes qui sont indiqués comme présents pour témoigner.

Pour les enfants mort-nés, on sait que la coutume voulait qu’ils soient enterrés discrètement au pied d’un arbre.

Quelque soit l’âge du défunt, il est normalement enterré le lendemain de son décès. Il y a parfois des épidémies qui multiplient les enterrements. Elles surviennent fréquemment en août, septembre ou octobre et on peut penser qu’il s’agit d’épidémies de dysenterie. Ainsi en 1726 17 décès sont enregistrés entre le 1° septembre et le 9 octobre. D’autres se déclarent en plein hiver lorsque la grippe frappe. Malgré tout à Massay on n’enregistre pas d’épidémies aussi catastrophique que dans certaines autres paroisses. Il apparaît pourtant parfois que le nombre de décès est le double de celui d’une année moyenne. Et les années 1739-1740 sont les plus noires, même si pour cette année-là nous ne connaissons pas le nombre d’enfants décédés. C’est de cette épisode que nait l’expression « je m’en f… comme de l’an 40 »

En revanche l’année 1724 est caractéristique du décès des jeunes. Cette année-là, 48 décès sont enregistrés. Seize d’entre eux concernent des enfants de moins d’un an. Ainsi à la naissance, un bébé sur trois ne passera pas l’année. 11 autres enfants vont décéder ayant entre 1 et 5 ans. Plus de la moitié des décès concernés concernent donc de tout jeunes enfants sans que l’on connaisse la cause de l’épidémie.

            Passé l’âge de cinq ans, les maladies infantiles ayant sans doute été surmontées, le risque de décès dans l’adolescence diminue sans être nul. 15 des décédés étaient en âge d’être mariés et 4 seulement avaient dépassé 50 ans. Le plus âgé, un ancêtre, a vécu 78 ans. Cette année 1724 n’est pas considérée par les livres d’Histoire comme une « année terrible » pour la France.                                Massay n’est pas toujours touchée par ces années terribles sauf 1739-1740 et 1783. Les débuts de cette année-là, de janvier à avril sont assez dramatiques. Nous avons déjà eu l’occasion de citer les malheurs de la famille Courtin au Moulin Bernard en 1724. Cette famille n’est pas plus chanceuse en 1783 : François décède à 14 ans le 9 janvier, sa sœur à 4 ans le 26 janvier et François le père le 2 février !

Ces années-là méritent d’être décrites. Par exemple en 1738 et 1739, les récoltes ont été très mauvaises et l’hiver 39/40 a duré très longtemps. Il a gelé et neigé à Massay jusqu’au mois de mai. Aux privations se sont ajoutées deux épidémies, l’une en octobre 1739, l’autre de grippe de février à mai 1740.

Malgré tout Massay a été moins touchée que d’autres communes même si en 1739 il y a eu 25 décès pour 15 naissances et en 1740 34 décès dont un tiers en mai pour 18 naissances, ceci sans compter les décès d’enfants non enregistrés. Il faut donc augmenter le nombre de décès d’environ un tiers, peut-être plus.

A titre de comparaison, à La Chapelle-Saint-Laurent, il y a eu en 1739 65 décès pour 34 naissances mais surtout en 1740 : 98 décès essentiellement an avril et mai pour seulement 18 naissances.

En 1783 à Massay on dénombre 65 décès pour 34 naissances et en 1785, 62 décès pour 25 baptêmes. D’ailleurs toute la période précédant la Révolution a été catastrophique.

Après la Révolution, les progrès en matière de soins ne se feront que lentement, mais la formation des sage-femmes va limiter les décès à la naissance. Nous le verrons dans une autre étude.

Chapitre 7 : Massay et la Révolution.

Bien que la convocation des Etats Généraux ait été décidée en 1788, elle n’a été expédiée dans les villages qu’en février 1789. Ce n’est que le dimanche 1° mars que les habitants de la paroisse sont invités à se réunir pour exprimer leurs doléances et élire leurs représentants à l’assemblée de la sénéchaussée de Saumur.

Ainsi à la sortie de la messe dominicale, les habitants âgés de plus de 25 ans et inscrits au rôle des impositions sont rassemblés. Citons les selon le procès-verbal de la réunion «Le 1° mars 1789, devant Louis Jaudonnet, syndic, en l’absence du juge du lieu….. en présence de maître Bourru fabriqueur, notable, Taillecourt, Naud, Liniers, Marchand, Noleau, Duvergier, Favenier, Perrochon, Philippeau, Renaudin, Emory, Hullin, Metais, Courjault, Roger, Dupoix, Billy notable, Boassé notable, Durand, Suire, Piloteau, Rigaudeau, Turpault, Bazile chirurgien, Liniers charron, Divigu, Renou sacristain. Pineau, Pinault, Aumont … tous nés Français, habitant la paroisse laquelle est composée d’environ 150 feux, tous âgés de 25 ans, compris dans les rôles des impositions… sont convenus de s’assembler le mercredi suivant 4 mars chez Louis Jaudonnet pour travailler au cahier de doléances… ont nommé pour les représenter Louis Jaudonnet et René Duverger fermier.

Louis Jaudonnet, nous l’avons déjà rencontré, c’est une des personnalités de la paroisse. En revanche qui est Duverger ? Il n’est pas né dans la paroisse, mais indiqué comme fermier, il est forcément instruit. Depuis quand habite-t-il Massay ? Impossible de le savoir, mais nous retrouverons son nom plus tard et il s’agit de Pierre Duverger, habitant alors le bourg, qui décèdera en 1806 à l’âge de 72 ans.

Nous constatons aussi que sur environ 150 chefs de famille, seulement 31 ont participé à la réunion pour exprimer leurs vœux et donner leur aval au cahier de doléances. Cela semble bien peu au regard des conditions qui sont assez larges : avoir plus de 25 ans et être inscrit sur les rôles d’imposition. L’assemblée générale a sans doute été dédaignée par nombre d’hommes peu intéressé par la politique.

On s’étonnera moins de ne trouver aucune femme, même si quelques veuves remplissaient certainement les conditions. En effet, ce que nombre d’historiens oublient de préciser et parfois même nient, les femmes étaient invitées à voter au même titre que les hommes. Mais la directive royale qui utilisait le mot « sujets » n’avait pas toujours été bien interprétée et certains hommes avaient sans doute œuvré pour qu’elles ne participent pas. Dans quelques villages pourtant, même dans un secteur relativement proche, on en trouve une proportion qui peut dépasser 15%. Quant aux religieuses, une directive particulière précisait par qui elles pouvaient se faire représenter.

Le 4 mars la réunion a lieu comme prévu. Un procès-verbal est établi sous forme de pouvoir pour les députés envoyés à l’assemblée de Saumur. Il est rédigé suivant le modèle imposé par le Parlement et existe aux archives, mais malheureusement le cahier de doléances qui devait lui être joint a disparu.

A défaut de posséder ce cahier, il est permis de penser qu’il ne devait pas beaucoup différer des cahiers de paroisses proches appartenant aux Marches Communes. A titre d’exemple on peut citer le cahier de Brion dont on retrouve nombre de formules recopiées dans divers cahiers du secteur. En voici les articles résumés :

A1 : Etablissement d’un parlement

A2 : Que le Poitou soit un pays d’Etat comme le Dauphiné.

A3 : Délibération par tête dans les assemblées.

A4 : Suppression des aides et de la gabelle.

A5 : Que les douanes intérieures soient repoussées aux frontières du Royaume.

A6 : Création d’un impôt dans la forme de la taille, mais partie sur les biens, parie sur les revenus de chaque citoyen en proportion de ses facultés.

A7 : Que gentilhommes et ecclésiastiques participent à cet impôt.

A8 : Que chaque bien de chaque personne soit imposé dans l’arrondissement de la paroisse où ils sont situés.

A9 : Que les tribunaux d’exception soient supprimés notamment dans les Elections.

A10 : Que les corvées et guets de garde, qui se perçoivent encore par certains, soient supprimés.

A11 : Que les Francs-Fiefs soient supprimés.

A12 : « Nous ne donnons aux députés pouvoir de consentir de nouveaux impôts qu’autant qu’il aura été accordé le vote par tête » et que nobles et ecclésiastiques seront soumis à ces nouveaux impôts

A13 : Que les mesures et poids soient identiques dans tout le royaume.

A 14 : Que les huissiers soient supprimés.

On le constate de tels cahiers très répandus peuvent être rédigés dans n’importe quelle commune de toute région. Ils sont plus ou moins inspirés des écrits de l’abbé Sieyes et copiés de modèles circulant partout dont certains attribués au Duc d’Orléans.

Heureusement d’autres cahiers sont plus directement liés aux préoccupations des habitants des villages, le droit de chasse, l’indiscipline des gabelous, ou encore l’entretien des routes et des chemins avec quelquefois des exemples précis très significatifs. Rien de semblable dans les quelques cahiers du secteur qui sont encore disponibles et il est à craindre que celui de Massay ait manqué aussi d’originalité.

Le plus intéressant des cahiers relevés dans la région est sans doute celui de Saint-Christophe du Bois, en particulier parce que cette paroisse appartient aussi à un secteur des Marches Communes.

A Saumur, il est probable que les deux représentants de Massay n’aient pas pesé beaucoup. Le cahier bien rédigé aborde tous les domaines. Nous ne le développerons pas ici.

 Il faut pourtant noter que ce cahier était très contraignant pour les représentants aux Etats-Généraux, ne les autorisant pas à délibérer dans le cas où cinq articles précis n’auraient pas été accordés. Ils concernent « la composition de l’Assemblée, le consentement mutuel du Roi et de l’Assemblée, le droit seul de l’Assemblée d’imposer, d’accorder ou refuser des subsides… d’ouvrir des emprunts… le retour des Etats Généraux tous les cinq ans, que tous les sujets de quelque ordre, état, conditions et provinces en proportion de leurs facultés contribuent aux impôts. »

Ce cahier comporte 40 articles dont l’un relatif au clergé et prouve que celui-ci pesait sur la population. Les députés demanderont « l’augmentation suffisante de la portion congrue afin de pouvoir supprimer le casuel et les quêtes. » Enfin plus surprenant et difficile à réaliser il est demandé « le moyen de rendre l’Argenton navigable »

Les députés du Tiers-Etat de Saumur n’ont d’ailleurs guère fait parler d’eux à l’Assemblée Constituante, même s’ils y ont poursuivi les travaux avant que les cinq conditions du mandat impératif aient été respectées.

1790 : Aucun grand évènement ne semble marquer cette année-là, sinon le remplacement du curé qui a refusé de prêter serment, que nous avons déjà noté. Il semble aussi qu’une garde nationale ait déjà été mise sur pied mais c’est probablement l’année précédente au moment de la Grande Peur.

1791 : Encore une année relativement tranquille apparemment, pourtant un évènement important y a des conséquences durables : La vente des biens nationaux dont ceux de l’église.

Les acheteurs sont surtout des étrangers à la commune. Le lot le plus important reviendra à Paul Leroux de Tourtenay qui achète Vaucouleurs et achètera aussi Sainte-Lienne à Moutiers. C’est un malin qui revendra par la suite par lots nombre de ses acquis dont une partie de Vaucouleurs à Chabert de Bouillé-Saint-Paul qui s’y installera. Ce même Chabert prend aussi les dépendances de la chapelle N.D de Meslé Henri Boisleau de Saint-Clémentin et Joseph Menoust-Maisonneuve profitent aussi de ces ventes alors que le curé Marc Babaud, Louis Jaudonnet et Jean Suire, le meunier du Moulin Neuf, sont les autres acquéreurs de cette année.

Les autres biens seront vendus plus tard à des étrangers à la commune. On peut affirmer que même si les biens de l’Eglise ont été achetés plus chers que leur estimation, les acquéreurs ont fait de bonnes affaires. En effet ils payaient en assignats et à crédit. Compte tenu de la dépréciation rapide de la monnaie, ce qu’ils devaient payer au titre du crédit ne valait plus grand-chose. Finalement ils n’ont pas payé cher leurs acquisitions.

1792 Les registres paroissiaux s’arrêtent et les registres d’état-civil les remplacent au début de l’été mais ne donnent aucune indication sur ce qui s’est passé à Massay pendant les évènements importants de cette période de la Révolution. En revanche le registre des délibérations du conseil municipal qui débute en Juin donne certaines indications, même si les commentaires sont rares.

A l’évidence ce conseil existe depuis un certain temps déjà, mais les comptes-rendus des séances étant rédigés sur des feuilles volantes, ils se sont perdus. Le maire est Chabert qui n’est pas né à Massais mais est venu s’installer dans la paroisse après l’achat de Vaucouleurs. Le procureur qui sera bientôt désigné comme officier public (chargé des registres d’état-civil) est Bazile le chirurgien qui était né à Cerizay et ne s’était implanté dans la commune qu’en 1783. Jean-Louis Babaud fait aussi partie du conseil, c’est lui aussi un presque étranger à la commune du moins à ses familles traditionnelles. Enfin au conseil siège aussi Watelet qui était lieutenant de gabelle ! Cette prise en main du conseil par des nouveaux venus est assez surprenante. S’agit-il chez les familles bien implantées de prudence ou d’incapacité ? Cela ne semble pas en tout cas dénoter un refus de toutes les nouveautés révolutionnaires car Massais va plutôt se situer dans le camp des Bleus et sera même considéré par certains historiens comme un avant-poste du pays républicain et un butoir face aux Vendéens.

L’effectif de la garde républicaine est même signalé comme atteignant une centaine d’hommes ce qui paraît énorme. Soit tous les citoyens actifs étaient contraints d’y participer, soit, ce qui est plus probable, y étaient incorporés des hommes des villages voisins où aucune garde n’était constituée. Le premier capitaine de cette garde était Pierre Duverger, mais il démissionnera assez vite et sera remplacé par Jean-Louis Babaud.

Le 19 août, un arbre de la Liberté est planté à Massais sur la place principale rebaptisée « Place de La Carie ». Le rédacteur du procès-verbal est enthousiaste dans sa description de la manifestation à laquelle aurait participé la majorité de la population et évidemment la garde nationale. Rappelons que c’est le 10 août que le Roi a été chassé des Tuileries pour être enfermé ensuite au Temple, mais dans d’autres villages des arbres de la liberté avaient été plantés dès 1790.

Le 26 août la garde va être appelée en renfort à Bressuire lors des premiers évènements du secteur. C’est le premier engagement concret qui peut être considéré comme vraiment favorable au régime révolutionnaire. Il mérite donc quelques précisions :

Dans le district de Chatillon (Mauléon) les autorités ont commencé à faire une chasse sérieuse aux curés insermentés. Ils y ont été encouragés par un décret de la Législative qui indique que ces prêtres seront déportés sur simple demande de vingt citoyens actifs de leur canton. Plusieurs curés intrus ont déjà été désignés pour les remplacer, soulevant la colère des villageois contre les autorités. De plus les paysans sont obligés quand ils vont au marché de Bressuire de payer une taxe établie dans cette ville depuis plusieurs décennies en remplacement de la taille. Ce dernier impôt a été supprimé mais la taxe demeure à Bressuire ce que refusent les paysans d’alentour. Enfin en juillet il est fait un appel aux volontaires pour renforcer l’Armée et le conseil municipal a donné l’ordre d’établir une liste des volontaires, mais aussi de ceux qui ne le seraient pas. Cette consigne semble avoir été suivie à Chatillon et a exaspéré les habitants. On retrouve les ingrédients qui déclencheront les évènements de 1793 : chasse aux curés, impôts, engagement dans l’armée, rejet des autorités révolutionnaires et jalousie contre les bourgeois des villes qui sont aux commandes.

Aussi les paysans vont se révolter, occuper Chatillon puis Bressuire. Il y a eu peu de combats dans l’engagement de la garde nationale de Massay aux côtés de celles de Cholet, Thouars et d’autres villes mais il semblerait qu’un sanglant massacre de paysans désarmés ait été réalisé. Nous n’avons aucun renseignement précis sur l’action de la garde du village. Aucun tué ni blessé en tout cas n’est à déplorer.

Le 9 décembre, le conseil municipal et renouvelé. Il comporte désormais 18 personnes et Louis-Gaspard Fournée est élu maire. Les « étrangers » au village sont toujours là, mais on ignore totalement qui pouvait voter et combien il y a eu de votants.

L’officier public désigné le 26 décembre est Léger Bazile. Là se corse le mystère du curé Marc Babaud. En effet il a d’abord été désigné comme officier public sous réserve de son acceptation car il n’est pas présent. Cette proposition semble étrange, mais peut-être faut-il y voir de la part de la municipalité une réconciliation du village avec son curé, à moins que ce soit un acte destiné à le protéger des poursuites ?

Ce curé non jureur a-t-il refusé le poste ou a-t-il déjà disparu de la paroisse ? En tout cas il n’est pas loin car le dernier acte signé de lui dans le secteur est l’enregistrement d’un baptême le 22 décembre à la place du curé de Moutiers-sous-Argenton. Pourquoi officiait-il dans cette paroisse ? Etait-ce fortuit ou s’y était-il réfugié ?

Cet acte prouve que Marc Babaud vivait encore à cette date et que, s’il a réellement été noyé dans le Thouet, c’est peut-être qu’il y a accompagné l’offensive des Blancs quelques mois plus tard.

A noter cependant que les relevés du conseil municipal ne mentionnent pas le remplacement à l’église du curé Marc Babaud par son oncle qui reprend du service. Rien ne prouve que ce changement se soit fait avant la fin 1792. Pour essayer de mieux comprendre quand ce changement a eu lieu, nous avons étudié le déroulement des évènements dans trois paroisses voisines.

A Moutiers- sous- Argenton : C’est Chesset qui est curé jusqu’au 24 août 1792. A cette date, sur la même page du registre, c’est Dupoisseau, officier public, qui enregistre uniquement les décès avec cette formule surprenante « nous avons eu connaissance que le corps de … a été enterré dans l’église et le cimetière. » Qui était le curé Chesset un temps ou Baudineau qui reprend un peu plus tard l’enregistrement en signant « Baudineau curé de Moutiers » sauf le dernier acte signé Marc Babaud, mais aussi recopié par Fouchereau nouvel officier public. On sait que le curé Chesset est parti en Espagne, mais on ignore à quelle date. Il réapparaîtra en 1802.

A Bouillé-Saint-Paul : Le curé s’appelle Cesvet. Il est non jureur et son dernier acte date de novembre 1792. Puis ce sont les officiers publics que l’on trouve et signent « Bouillé Lhormaux » (sic). Le village a changé de nom. Mais on sait que Cesvet suivra ensuite les Vendéens. Il est donc resté sur place jusqu’au printemps 1793.

A Saint-Aubin de Baubigné : Jusqu’au 31 mai 1791, C’est le curé Merle qui signe les actes « curé de Saint-Aubin » depuis 3 ans. Puis c’est un certain Robin qui signe « indigne curé… » c’est donc sans doute un curé jureur qui a quelques remords. A la fin du mois de juin apparaît le nom de Delafargue qui signera même des actes « curé constitutionnel… ». Nous avons déjà souligné que dans le district de Bressuire, la chasse aux curés avait commencé beaucoup plus tôt.

De ces exemples on peut conclure que le remplacement des curés a eu lieu à des périodes assez différentes, qu’il ne faut pas s’étonner que Marc Babaud ait conservé son poste jusqu’à la fin 1792. Cela n’éclaire pas sa disparition, mais peut-être a-t-il suivi la même voie que le curé de Bouillé-Saint-Paul ?

1793 : Le début de l’année semble se dérouler sans incident majeur, y compris lors des opérations de la levée de 300 000 hommes dont l’ordre transmis par Thouars arrive le 12 mars. La municipalité fait aussitôt sonner les cloches et battre le tambour, mais il ne se présente pas assez de jeunes hommes. Les villages éloignés n’ont peut-être pas été avertis. Qu’à cela ne tienne, le maire et deux adjoints sont désignés pour aller avertir les écarts et organiser un rassemblement le 14 mars matin.

Une querelle entre membres de la garde nationale relative au partage d’une somme de 150 livres versée à Massais pour l’engagement à Bressuire avait créé de sérieuses dissensions. Malgré tout le rassemblement du 14 mars se déroule dans de bonnes conditions. Il a sans doute été astucieusement préparé par les autorités et il n’est pas nécessaire de tirer au sort car se présentent 14 volontaires. Bizarrement 6 d’entre eux seulement sont de la commune ! Les autres appartiennent aux districts de Thouars, Bressuire et même Saumur. Etaient-ils travailleurs sur la commune, vagabonds ou déjà réfugiés ce qui semble peu probable ? Il est impossible de le savoir. Au total 6 volontaires sont retenus, le plus âgé a 36 ans, le plus jeune 18. Cependant ils ne partent pas tout de suite et le 16 mars la municipalité demande à Massais de tenir sa garde prête à toute réquisition et 57 hommes partent pour Argenton dont les volontaires.

C’est à cette époque que commencent les ennuis de Madame Marillet. Le district de Thouars demande à la municipalité de faire une enquête sur la famille. Il faut rappeler que Madame Marillet était une demoiselle Ogeron De Ligron, donc bien connue à Thouars où la famille a sans doute eu des problèmes. Cette enquête est faite avec pondération mais inquiète Madame Marillet qui quitte La Davière et se réfugie dans le bourg. Elle obtiendra même un certificat de civisme ce qui ne l’empêchera pas plus tard d’être arrêtée et emprisonnée par les autorités de Thouars. Ses biens mis sous séquestres seront protégés par la municipalité.

Le climat s’alourdit en avril avec l’arrivée des nouvelles de l’insurrection de Vendée et les mouvements des « Brigands » qui traversent régulièrement les communes du Breuil et de Genneton.

Bien que visiblement républicain, le Conseil Général de la commune s’en remet à Dieu pour rétablir la paix et à la sortie de la messe exhorte les fidèles à faire offrande d’un cierge en amende honorable et prie le curé de célébrer à cette occasion une Grande Messe chantée ! et le Conseil invite aussi les habitants à assister tous les dimanches à la messe. Quel est le curé qui a dit cette messe ? nous l’ignorons, mais il paraît douteux qu’à cette époque la municipalité fasse encore appel à Marc Babaud, c’est plus probablement l’oncle qui officie maintenant.

Pourtant la commune n’a pas encore été atteinte par les troubles et s’avère plutôt aux « Bleus ». Cette position se constate dans l’arrivée de premiers réfugiés dans la commune au moment où les évènements de Vendée s’aggravent.

En effet jusqu’à Argenton-Château, que la République a rebaptisé « Argenton le Peuple », les « Blancs » sont assez présents et les combats qui se déroulent incitent déjà quelques familles à fuir.

Cependant Massais, au moment du passage des Vendéens vers Thouars ne semble pas avoir été un lieu de combat et n’a pas alors justifié son titre de « butoir de la Vendée » que lui accorde Jacques Piret dans son ouvrage sur l’histoire de la Révolution en Poitou Charentes.

Selon les récits d’un soldat vendéen, sa colonne a évité Massais, mais d’autres colonnes ont peut-être traversé le village. Quant à la garde nationale, ou au moins une partie d’entre elle, elle s’est repliée à Thouars et si elle a combattu quelque part, elle n’a a priori subi aucune perte.

Outre le cas particulier et incertain du curé, une dizaine d’habitants ont rejoint les Vendéens, plusieurs combattirent dans leurs rangs. On peut citer : André Dubois, Louis Clochard, Pierre Millasseau, Jean Nauleau, Joseph Vochand, Jean Coiseault, Jacques Noireau, Jean Guédon, Jean-Pierre Marolleau. Ceux-ci d’ailleurs ne représentant que ceux qui sont revenus vivants des combats. La liste de tous les tués au combat ou pendant la Virée de Galerne n’est pas connue. Mais le fait que Magdeleine Blétrau, veuve Ducoudray est été condamnée à mort et exécutée à Nantes le 18 Nivose An II, prouve qu’il y avait des habitants de Massais engagés dans cette aventure.

D’avril à octobre 1793 le registre d’état-civil est interrompu, preuve que la situation est confuse mais aussi peut-être parce que les principaux membres du conseil de la commune ont préféré se réfugier plus loin ou se faire discrets. Cependant c’est le même officier public Léger Basile qui reprend le registre en octobre.

 Quant au registre des délibérations il s’arrête pendant près d’un an à côté du 28 avril. Seuls sont enregistrés des certificats de civisme. Le premier est accordé au curé René Babaud et l’acte précise que celui-ci a exprimé son intention de reprendre ses fonctions de curé ! visiblement la religion n’a pas perdu ses droits.

1794 : l’année commence par les terribles représailles voulues par Turreau et la campagne dévastatrice des colonnes infernales.

Massais, à l’évidence, est un lieu de refuge très recherché. Nous avons identifié une quarantaine de familles ou de personnes venant des environs. Certains arrivent de Mauléon, mais la majorité vient d’Argenton, du Breuil, ou de Boësse. Peut-être ont-ils des connaissances ou de la famille à Massais. On les retrouve d’ailleurs assez également répartis entre le bourg et les différents hameaux de Pierrois à Bapteviande et Vaucouleurs.

Il est important de souligner que seules les familles qui connaissent alors une naissance ou un décès et justifient donc d’une inscription au registre d’état civil sont identifiables. Le nombre de ces familles réfugiées est donc à coup sûr supérieur à 40. Un certain nombre d’entre elles vont rester à Massais ce qui aura une incidence positive sur l’évolution démographique de la commune même si cette période révolutionnaire a été aussi la cause de quelques départs.

La fuite de ces réfugiés de leur maison s’est parfois faite dans des conditions difficiles comme en témoigne cet enregistrement du décès d’un enfant de 5 ans Jacques Rabin « fils de Jean Rabin de Genneton. Le dit Jean Rabin s’étant réfugié à Pierrois afin d’éviter la poursuite des rebelles qui se portaient au dit Genneton et où le dit Jacques a décédé ». Léger Basile, l’officier public qui enregistre les actes dit s’être assuré du décès de l’enfant. Faut-il en conclure que le père a transporté le corps de son fils dans sa fuite ou que la mort a eu lieu à Pierrois ? la phrase présente une certaine ambiguïté.

Cet officier public a d’ailleurs eu, comme bien d’autres, quelques difficultés à comprendre le nouveau calendrier révolutionnaire. Il a enregistré le décès en avril 1793 et ajoute « l’an deuxième de la République » or l’An I n’a commencé qu’en septembre 1792 et court toujours.

Les réfugiés ne sont pas les seuls à grossir la population de Massais. Des Bataillons des armées républicaines vont plus tard y séjourner comme en témoigne l’enregistrement d’une petite fille, Henriette Labat, dont le père est « chef tailleur du Bataillon du Lot et Garonne ». En passant le Bataillon a laissé quelques souvenirs …

Mais Massais n’a pas eu semble-t-il à souffrir de la guerre de Vendée. Quelques pillages ont bien été faits à l’aller et au retour des Blancs, mais un seul décès directement dû à des combats est enregistré. Il s’agit d’un dénommé Buord de Sainte-Verge « décédé sur la commune de Massais des suite des blessures que les rebeles de laVandée (sic) lui avaient fait la veille ». Mais ce décès est enregistré le 21 frimaire An III, c’est-à-dire en décembre 1794 (sauf si celui qui enregistre fait encore une erreur auquel cas ce serait décembre 1793 ?). Quelques combats auraient donc eu lieu à proximité de la commune ?. Des pillages seront d’ailleurs enregistrés comme étant dus aux hussards de la République et aussi par des citoyens « en patrouille » ce qui tendrait à prouver qu’il y eut quelques vengeances personnelles.

Il est permis de se demander à quelle époque a été partiellement brûlé le prieuré de Vaucouleurs. Il est possible que ce soit l’œuvre des vendéens puisque ce prieuré n’en était plus un et avait été vendu comme bien national. Mais là encore, aucune preuve ne vient confirmer cette hypothèse.

1794 et 1795 : Paradoxalement le village va d’avantage souffrir d’exactions en 1794 et 1795 . Cela n’est pas dû aux colonnes infernales ; le caractère républicain de Massais est assez bien marqué pour que la commune n’ait pas à subir les ravages de ces colonnes contrairement à Argenton-Château. C’est même dans cette commune que le Général Grignon donna son ordre resté célèbre « camarades, nous entrons en pays insurgé. Je vous donne l’ordre de livrer aux flammes tout ce qui est susceptible d’être brûlé et de passer au fil de la baïonnette tout ce que vous rencontrerez d’habitants sur votre passage. Je sais qu’il peut y avoir quelques patriotes dans ce pays, c’est égal, nous devons tout immoler ».

Certaines exactions sont dues aux vendéens qui viennent se ravitailler et sans doute exercer quelques vengeances contre les habitants les plus marqués comme Jean Sorin qui a servi de guide à la colonne de Grignon. La première agression est datée de juin 1794. Elles se poursuivront à un rythme soutenu jusqu’en mars 1795. Parmi les victimes de ces pillages il y a un adjoint au maire, un conseiller municipal et deux lieutenants de la Garde, mais ni le maire ni Jean-Louis Babaud, habitants le bourg et peut-être plus difficiles à atteindre n’ont été visés, à moins que leur conduite ait été jugée moins répréhensive.

Enfin cette année 1794 est aussi marquée, nous l’avons déjà cité par l’exécution à Niort le 19 mars de Claude Marillet de La Davière qui avait émigré dans les armées du Prince et était revenu à Massais.

Le régime Thermidorien permit cependant de revenir à une situation plus normale et à certains habitants qui avaient rejoint les Blancs de rentrer dans la commune sans difficulté particulière. Malgré tout nous savons que à la fin de décembre 1795 des bandes vendéennes ont « pillé et dévasté Ulcot, Massais et Genneton ». Quels dégâts réels ont été faits ? on l’ignore mais nous sommes à la veille de la reprise des hostilités par Stofflet qui reprendra Argenton-Château le 20 janvier 1796.

Pour conclure notons que le rôle de frontière de Massais est encore caractérisé par la comparaison de l’évolution des populations dans la commune et à Argenton Le Peuple, le village le plus proche à l’ouest.

A Massais la population est passée de 595 habitants en 1792 à 619 en 1800

A Argenton elle passe de 830 habitants à 270 pendant la même période !

Ces données sont assez éloquentes pour se passer de commentaire.

Ainsi la Révolution n’a pas été sanglante à Massais, et si elle n’a pas eu d’incidence notable sur la vie quotidienne – naissances, mariages, maladies et décès- et si elle n’a pas dans l’immédiat rendu les habitants plus riches (et peut-être plus heureux ?) elle a cependant entraîné des changements notables des mentalités et des conditions de vie, notamment en ce qui concerne l’accès à la propriété.

Quant aux changements administratifs ils ont été importants avec la suppression des Marches Communes, la création des départements et le rattachement à Thouars. Mais nous avons vu que Bressuire sera rapidement la sous-préfecture désignée.

Chapitre : 8 CROYANCES ET MYSTERES

Certaines croyances sont communes à toute la France, d’autres plus régionales. Nous signalerons ici celles auxquelles nous avons la certitude que les habitants de Massais étaient très attachés.

Saint Cloud : ce Saint est connu et prié pour guérir les furoncles (les clous) et toutes les maladies de la peau. Dans l’église actuellement on peut admirer une statue de Saint Cloud et il est certain que les paroissiens allaient implorer le Saint pour les guérir de leurs problèmes ou pour se protéger de ces maux. La statue a-t-elle toujours été placée dans l’église ? c’est possible. L’actuelle est peut-être une copie de celle qui existait dans une chapelle. Les Saints guérisseurs étaient en général placés dans des lieux plus discrets par respect pour les malades.

Saint Roch : ce saint, très vénéré pendant le Moyen Age était connu pour protéger de la peste, maladie qu’il avait combattue toute sa vie en soignant les pestiférés. La chapelle Saint Roch était au village La Richard. Sa statue est également dans l’église. Des habitants de Massais avaient l’habitude de s’y rendre en pèlerinage le dimanche suivant la fête de Saint Roch, mais ils n’étaient pas les seuls, les habitants de Moutiers et ceux de Mauzé s’y rendaient aussi.

Saint Mathurin : Selon les croyances ce Saint serait né dans le Gâtinais et il aurait eu le pouvoir de chasser les démons. Sachant que la crainte des démons et des manifestations démoniaques était très répandue au Moyen Age, il n’est pas étonnant qu’il ait été vénéré. Il ne l’est pas partout mais il l’est dans la région où les prénoms de Mathurin et Mathurine sont assez fréquents jusqu’au milieu du 18ème siècle. Dans certaines paroisses le prénom de Mathurine était même plus fréquent au 17ème siècle que celui de Marie. Une chapelle Saint Mathurin était située à La Roussière.

On invoquait aussi Saint Mathurin pour les fous et ……. les épouses insupportables !!

Saint Hilaire : Ce Saint est connu par ses écrits et comme évêque de Poitiers au 4ème siècle. Il est mondialement vénéré, mais particulièrement dans la région où de nombreuses églises et chapelles lui sont dédiées. Bizarrement alors que l’église de Massais est dédiée à ce Saint, très peu de personnes portaient ce prénom. Il y a sans doute derrière cette absence un interdit ou une croyance qui nous échappe.

Saint Eutrope : il y avait à Vaucouleurs une chapelle dédiée à Saint Eutrope, un évêque de Saintes dont la réputation était de faire des miracles en tous genres, les habitants de la paroisse venaient le prier contre les fièvres et allaient le vénérer une fois par an le dimanche suivant sa fête célébrée le 30 avril.

En général Saint Eutrope est surtout recherché pour guérir les enfants « estropiés ».

Saint Michel et Saint François de Sales : ces deux Saints ont leur statue dans l’église mais nous ignorons si les habitants avaient une raison particulière de les vénérer.

Les mystères :

La Butterne ou La Buterne ? Le nom est bien connu des anciens dans le village, quant à savoir comment il faut l’écrire, c’est un mystère. Aucun dictionnaire ou document ne donne la moindre indication à ce sujet, mais comme le verbe «erner » appartient au parler ancien du Poitou, il n’est pas exclu que ce soit là qu’il faille chercher l’origine du mot. Erner signifiait « casser les reins, éreinter ». On disait d’un homme qu’il s’est « erner au travail ». Et il en a certainement fallu du travail pour ériger cette butte qui n’a rien de naturel puisqu’il est estimé qu’il fallait au moins 30 hommes pendant 100 jours pour ériger une motte féodale.

Bien que certains historiens comme Maurice Poignat qualifie la butterne de tumulus il s’agit en réalité sans aucun doute d’une motte féodale, le fossé qui l’entourait est encore perceptible ; mais pourquoi là et construite par qui ? C’est sans doute le plus grand mystère de la commune et ce mystère a entretenu bien des légendes. Selon certains anciens la butte renfermerait un veau d’or. Pour d’autres elle protégerait le Graal ou le trésor des Templiers !!!! Toutes ces légendes qui courent sont évidemment sans fondement mais continuent à circuler d’autant que certains habitants ont été victimes de phénomènes mystérieux. Ainsi un témoin sérieux raconte que, accompagné de ses deux fils, il a vu une boule extrêmement brillante traverser le ciel et s’arrêter à la Butterne et qu’alors il a vu comme les colonnes d’un temple. L’évocation des Templiers réapparait. Ceci se passait dans les années 1990. Mais bien plus tôt, dans les années 40, une femme a vu un phénomène assez semblable d’une étonnante boule de feu traversant le ciel dans le même axe jusqu’à la butte. Attirerait-elle la foudre ?

Les souterrains : dans presque tous les villages on parle de l’existence de souterrains. Ils sont rarement identifiables et reconnus. Massais n’échappe pas à la règle.

De nombreuses histoires ont couru sur l’existence de tels souterrains à Massais. L’un irait de la Carrie à la Roussière, voire jusqu’au bourg ? un autre existerait à Vaucouleurs. De tels ouvrages apparaissent très improbables, même impossible compte tenu de la nature du terrain. En revanche l’existence de cavités d’une certaine taille ayant servi d’abri ou de refuge autrefois n’est pas exclue. Nos aïeux, sans évoquer les troglodytes, ont souvent utilisé des refuges souterrains pour se mettre à l’abri des invasions et des pillages. Dans la région cela a été le cas jusque et y compris l’arrivée des Normands. A la Carrie les anciens se souviennent de l’entrée de ce qu’ils qualifient de souterrain. Un éboulis proche de cette entrée ne permettait pas d’en savoir plus, depuis cette entrée a été obstruée.

Près de Vaucouleurs un éboulis semble avoir été réalisé pour boucher l’entrée d’une cavité. De là à parler de souterrain important il y a une marge mais cela permet de rêver.

Rappelons enfin que l’un des principaux mystères reste le sort de l’Abbé Marc Babaud. Est-il mort ? En martyr de sa foi, jeté dans le Thouet ? Peut-être un jour trouvera-t-on un document qui confirmera ou infirmera cette histoire et lèvera ce mystère.

[1]Les 16 paroisses étaient par ordre alphabétique: Argenton l’Eglise, Bagneux, Bouillé-Loretz, Bouillé-Saint-Paul, Brion, Cersay, Genneton, Louzy, Massay  Saint-Léger-de-Montbrun, , Saint-Martin-de-Macon, Saint-Martin de Sanzay, Saint-Cyr-la-Lande,

Les commentaires sont fermés.